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16 janvier 2010 6 16 /01 /janvier /2010 19:42
 

Amateurs de jardins, réjouissez vous !

Nos lecteurs connaissent bien les Éditions du Sandre, cette brave maison de livres qui exhume régulièrement du passé quelque trésor englouti. On y découvrait récemment les meilleurs pamphlets du Cardinal de Retz, un introuvable d'Ernest Raynaud, Baudelaire ou la religion du dandysme, ainsi qu'une réédition des oeuvres de Chamfort, parfaitement commentée par Lionel Dax. On y trouve désormais la revue Jardins [1], petite merveille sortie de l'imagination de l'historien Marco Martella et d'une phalange d'amateurs d'horticulture littéraire et poétique. Le manifeste en restitue parfaitement le projet :

Le jardin, qu'il soit ancien ou moderne, princier ou ouvrier, utilitaire ou d'agrément, caché ou public, est un laboratoire. Depuis toujours, les hommes qui expérimentent des manières d'être sur terre, entre nature et culture. Autrefois, il condensait des rêves de beauté idéale ou des cosmogonies. Désormais, il est peut-être avant tout un enclos de résistance. Parce qu'il  échappe au marché [...]. Parce qu'on ne peut le consommer et qu'il nous met toujours en présence d'un lieu. Explorer le jardin comme espace poétique et existentiel, telle est l'ambition de cette revue.

Le thème de ce premier numéro est le Génie du lieu, ce genius loci des Romains qui habite chacun de nos espaces et dont il faut, pour bien vivre, gagner les faveurs. Si  le jardinier en est, la plupart du temps, le dépositaire, ce genius loci peut revêtir des formes très diverses. Il peut s'agir d'un poète, auquel cas il faut oeuvrer avec délicatesse, comme l'explique Michel Farris, jardinier en chef des jardins Albert Khan :

On essaie de rester fidèle à l'esprit que le lieu incarne. J'essaie d'expliquer à nos jardiniers que c'est la technique qui doit s'adapter au jardin et non pas l'inverse. Je les pousse à comprendre l'histoire du site et l'esprit du jardin japonais mais aussi celui des autres entités. on s'intéresse avant tout au personnage d'Albert Khan. Parfois j'ai l'impression qu'on parle de lui comme s'il était parmi nous.

Il peut s'agir aussi d'un lieu sacré, demeure éternelle des dieux, comme ce jardin d'Agrigente évoquée par Edith de la Héronière, ce bois sacré de Toscane, où le peintre américain Sheppard Craige fait son jardin depuis 1995, ou encore ce jardin chinois, où le maître Nan Shan transmet son art à des disciples choisis.

Sans oublier ces jardins vénitiens du XVIe siècle, sièges de la conversation, des femmes et de la musique, ces abords de Port-Royal, où veillent délicatement les ombres de Racine, de Boileau et de La Fontaine, ou encore ce beau parc français, dont le maître des lieux dort, tranquille, près de la Loire, aux confins du Berry et de la Sologne.

Et voici les jardins dans leur variété - pierreux, ombreux, clos, ouverts ou morts - ; ils sont  à l'image des hommes qui les font, les défont, les aiment ou les négligent. Marie Rouanet nous en donne une série de portraits, dont ce verger à l'été, qui semble sortir d'une toile de Poussin :

En contrepartie du verger mort un verger tout neuf descend en pente douce vers l'eau, à l'endroit où la route s'écarte un peu de la rivière. Sous les pêchers, pommiers, poiriers le sol est net. En ce mois d'août des pêches de vignes écarlates sont tombées au sol et dessinent des ombres roses au pied de jeunes arbres. Dans dix ans, il y aura là un lieu de délices. Rien ne sera plus propice aux murmures amoureux que ce verger au printemps. Quelques remuements d'oiseaux entrant dans leur repos, des arbres qui dérobent les silhouettes, les flûtes délicates des crapauds, les odeurs de fleurs, de fruit et d'eau, la respiration des feuillages, le champ du courant au bord du chemin exalteront le corps et le coeur ou les inviteront au repos. En attendant, le maître du jardin donne, à qui le veut, des leçons de taille.

Tout est décidément parfait dans cette première livraison de Jardins, que nos lecteurs parcoureront avec volupté. Nous garderons, quant à nous, l'oeil ouvert dans cette direction où semblent se tramer des choses pleines d'intérêt.

eugène charles.


[1]. Jardins, Revue fondée par Marco Martella, n° 1, Année 2010. (Les Editions du Sandre, 57 rue du docteur Blanche, Paris 16e.)

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Eugène Charles - dans Revue des revues
14 janvier 2010 4 14 /01 /janvier /2010 23:40
Retour de l'autogestion

Séquestrations, violence, occupations dures,... l'année 2009 restera marquée par un climat social particulièrement tendu, comme on en aura peu connu depuis la fin des années 80. Le printemps et l'été 2009 ont été spécialement chauds, avec la radicalisation du conflit chez Continental, les séquestrations de patrons ou de cadres chez Sony dans les Landes, chez Caterpillar à Grenoble, chez 3M à Pithiviers et l'occupation musclée de l'usine Molex de Toulouse. Illustration de la désespérance qui étreint de nombreux salariés, les employés de Nortel, de New Fabris puis de JLG menacent de faire sauter leur usine. Ceux de Serta annoncent leur intention de déverser des fûts toxiques dans la Seine. A côté de ces conflits emblématiques, ce sont des centaines d'actions, de débrayages ou d'occupations, souvent ignorés de la grande presse, qui ont fait l'actualité sociale dans toutes les régions.

Quelles leçons les travailleurs en lutte et leurs organisations syndicales peuvent-ils tirer de cette année explosive ? Il apparaît en premier lieu que les salariés ont décidé de ne plus se laisser faire. Face à des équipes patronales extrêmement déterminées, en particulier dans les sociétés sous contrôle étranger, la seule réponse possible, c'est le plus souvent la force. Cette stratégie de l'affrontement a généralement payé: chez Sony, chez Caterpillar, chez Molex, aujourd'hui chez Alten, les équipes de siège rentrent dans le jeu, rouvrent les négociations, déjugent l'encadrement local, finissent par signer des accords de reclassement ou par accorder des indemnités acceptables. Même dans les conflits les plus désespérés, comme chez New Fabris à Chatellerault, la mobilisation impose à l'Etat d'intervenir et de débloquer la situation. Troisième leçon précisément: la violence ouvrière conduit le politique à reprendre ses droits, elle force les élus et les pouvoirs publics à assumer leurs responsabilités. A de multiples reprises, on a vu des députés UMP renier leurs engagements libéraux et prendre parti pour les salariés en lutte dans leur circonscription. Les seuls moments où le gouvernement a senti les limites de son discours patronal, c'est lorsqu'il s'est trouvé dans l'obligation d'arbitrer des conflits sociaux de grande ampleur.

Après les débordements et les explosions de l'an dernier, 2010 verra sans doute des mouvements sociaux plus maîtrisés, mieux organisés, plus élaborés.  Les directions syndicales  entendent reprendre les choses en main, en ciblant les groupes dont les comportements sont les plus scandaleux et en forçant l'Etat à agir. Le conflit le plus emblématique est celui qui secoue actuellement l'industrie pharmaceutique, et en premier lieu le groupe Sanofi-Aventis. Le secteur a dégagé en 2009 des bénéfices record et les équipes de direction se sont attribuées des primes indécentes. Ce qui n'empêche pas la direction de Sanofi de chipoter sur les augmentations salariales et de confirmer la suppression de 1300 postes dans ses activités de recherche. L'intersyndicale, solidement constituée, tient là une cible de choix; elle a mobilisé l'ensemble des salariés, bloqué les 40 sites du groupe, alerté les politiques, le ministère de la recherche et Bercy. On dit que le gouvernement aurait sévèrement tancé la direction de Sanofi, sommé de se remettre à la table de négociation.

On assiste également au retour d'une vieille idée qui nous est plutôt sympathique, l'autogestion. Le 7 janvier dernier, 150 ouvriers, cadres et ingénieurs du site Philips de Dreux, sous procédure de licenciement, décidaient de prendre le contrôle de leur usine et de poursuivre à leur profit sa production d'écrans plats LCD. L'expérience avait toutes les raisons d'inquiéter le groupe Philips, qui procède un peu partout en Europe à des restructurations sauvages et qui n'a nul envie de voir les salariés s'approprier ses stocks, ses sites et ses machines. C'est pourquoi huissiers et gros bras sont entrés en action mardi dernier pour reprendre le contrôle de la production, en menaçant les meneurs de poursuites. Dans le souci d'éviter des affrontements inutiles, le "contrôle ouvrier" a été provisoirement stoppé, mais il a toutes les chances de reprendre dès que les conditions le permettront à nouveau. Les milieux syndicaux, les partis de gauche et de nombreuses associations "alternatives" suivent de près les évènements de Dreux, qui pourraient prendre la même valeur symbolique que le combat des Lip, en 1973, à Besançon.

A travers ces premiers conflits, on mesure assez bien comment évolue le mouvement social. Les poussées de fièvre apparues l'an dernier chez New Fabris, chez Molex, chez Continental cristallisaient la désespérance; des salariés, méprisés, humiliés, le dos au mur, mettaient  toute leur énergie à obtenir des conditions de départ décentes, au prix parfois d'oppositions  avec leurs organisations syndicales qui cherchaient à  privilégier la défense de l'emploi. Chez Philips, comme chez Sanofi, la dynamique est combative, on refuse le désespoir, on se bat pour la pérennité de la production, on parie sur l'innovation et le savoir faire des producteurs. Le changement est complet.

D'où l'inquiétude et la fébrilité de certains secteurs parmi les plus durs du patronat français. On apprenait ainsi courant décembre que SFR (oui, l'opérateur de téléphonie si moderne et si jeune!) avait décidé d'engager un procès en représentativité à l'encontre du syndicat Sud, au prétexte que les statuts de celui ci font référence au socialisme autogestionnaire. Une notion contraire aux "valeurs républicaines de respect de la propriété", selon l'avocat de SFR. On aura tout vu ! Qui disait, au début du siècle dernier, que le syndicalisme révolutionnaire n'avait rien à attendre des valeurs de la République. Nous guetterons évidemment avec intérêt le verdict de ce procès !

Si les travailleurs relèvent la tête, le temps du désespoir n'a pas disparu pour certains. Ainsi de ces 190 salariés du fabriquant de caravanes Hymer France à Cernay, qui soupçonnent leur employeur, le groupe allemand Hymer, d'organiser la liquidation de sa filiale actuellement en redressement judiciaire. Sans aucune nouvelle de leur maison-mère, ils ont commencé à brûler des sièges, des meubles et des composants et annoncent leur intention d'incendier une partie de la production "si rien ne bouge". La violence reste pour eux l'ultime façon de se faire entendre.

Henri Valois.

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11 janvier 2010 1 11 /01 /janvier /2010 11:30
Bonjour NewYork                 


de Françoise Sagan
Mis en ligne : [11-01-2010]
Domaine : Lettres

sagan.jpg

 

Parmi les oeuvres de Françoise Sagan (1935-2004) récemment publiées: Maisons louées (Les Carnets de l'Herne, 2008), Le régal des chacals (Les Carnets de l'Herne, 2008), Au cinéma (Les Carnets de l'Herne, 2008), De très bons livres (Les Carnets de l'Herne, 2008), La petite robe noire (Les Carnets de l'Herne, 2008), Lettres de Suisse, (Les Carnets de l'Herne, 2008), Des yeux de soie, nouvelles (Éditions Flammarion, 1975 - rééd. Éditions Stock, 2009).


Françoise Sagan, Bonjour New York, Paris, Editions LGF, mai 2009, 90 pages.


Présentation de l'éditeur.
New York, Capri, Naples, Venise, Cuba, Jérusalem… autant de destinations d’écrivains, de milliardaires, d’assoiffés de vie et d’imprévus. De ces villes mythiques, Françoise Sagan rapporta des tableaux saisissant d’une plume vive et légère l’esprit de chaque lieu. La retrouver avec ces petits carnets de voyage est un pur bonheur. Bonjour New York rassemble quatre reportages de Françoise Sagan, écrits en 1956 pour le magazine Elle. Maisons louées réunit des articles publiés dans L’égoïste, L’Express, Elle, Vogue, Senso ou encore Le Monde.

Recension de L Hurtebise. - Le Magazine des Livres, juillet-août 2009.
Quand Sagan se promène... Sagan savait écrire, raconter des histoires, échafauder de doux romans autour de personnages nonchalants, élégants, sombres ou sombrant, fiers ou festoyant. Mais peut-être que le plus agréable dans les textes de Sagan, ce sont ces moments où elle parle d'elle, de ce qu'elle aime ou condamne, regrette ou espère. Ainsi, Bonjour New York apparaît comme une occasion de plus de se plonger dans ces instants où Sagan se promène et devise. Car elle avait ce pouvoir, que nous n'avons que rarement finalement : le pouvoir de voir. Grand bien nous fasse qu'une telle femme ait su écrire également. Bonjour New York, c'est Sagan en ballade. Elle se promène et décrit, ressent pour nous (Est-ce vraiment pour nous? pour qui ou quoi écrivait-elle ces chroniques impromptues sorties du grenier?) Elle nous présente New York est ses dieux, si semblables aux siens, elle qui regrette que les Américains ne sachent que "gagner du temps sans savoir en perdre". Elle nous présente Naples, la belle alanguie inutile, Capri à laquelle on s'habitue mal et qu'on ne supporte  de quitter. Elle nous montre et orchestre la noyade de Venise, mise en scène magistrale d'un naufrage inévitable. Cajarc et Jérusalem sont aussi de ce voyage clairvoyant, envoûtant. Mais lorsque Sagan parle de Cuba et de son périple vain pour rencontrer Fidel Castro, ce n'est plus un voyage à travers le monde, mais bel et bien à travers l'Histoire. Elle passe, petite Française avisée et avertie, au coeur des révolutions cubaines. C'est Sagan qui est dans l'Histoire. Puis juste après, elle dresse l'histoire, celle de la Terre, avec un culot sans précédent lorsqu'elle se met dans le même panier que Hitler, Néron et Proust, tous confondus dans leur amour de la nature. Quel beau passage que la description de la Terre, boule Mère, portant "l'humain contre son flan", Dame rebelle et fataliste tirant de son enfant, assis sur ses hanches épaisses, sa propre perte. Voilà une genèse qui fera sans nul doute son entrée dans les annales de la littérature. Enfin, il y a cette merveilleuse histoire du cheval, où l'animal se fait tout à la fois nouvelle victorienne, sauce Sagan, souvenir émouvant d'enfance, bête de course sauveur des finances, ami fidèle ou étalon fainéant, conquête de l'homme ou premier invité de Noé. Comment ne pas penser, en la lisant, que, du cheval, Sagan a tout dit en quelques pages. Objet de jeu, d'élégance et de vitesse, à son image... Lui succède ce qu'elle considère notre refuge à tous : le lit. Voilà donc Sagan telle qu'en elle-même, qui , lorsqu'elle se promène dans le monde, l'histoire ou ses passions, nous donne de ces leçons inoubliables, sans prétention, avec nonchalance et générosité. Un régal donc, à consommer de manière immodérée.

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9 janvier 2010 6 09 /01 /janvier /2010 11:40
Provocations à Jérusalem

Alors que les négociations israélo-palestiniennes restent désespérément au point mort, la situation se dégrade de jour en jour entre les deux communautés juives et arabes à Jérusalem. Sous la pression des colons juifs, agités par le gel des constructions en Cisjordanie, le gouvernement de M. Nétanyahou joue ouvertement le jeu d'une relance du processus d'annexion de Jérusalem-Est, majoritairement arabe. Selon le quotidien Haaretz, les expulsions de Palestiniens dans cette partie de Jérusalem ont atteint un niveau record en 2008 (près de 5000 contre 8500 de 1967 à 2007) et le processus semble s'être encore amplifié en 2009.

Dans chacun des cas, la méthode est la même : les organisations de colons - comme Ateret Cohanim, fondée par le milliardaire américain Irving Moskovitz - s'appuyant sur le fait que ces terres ont appartenu dans le passé à des juifs obtiennent de la municipalité de Jérusalem l'expulsion immédiate de leurs occupants palestiniens. Ces familles, pour la plupart relogées à Jérusalem après leurs expulsions de Jaffa ou d'Haïfa, demandent alors à récupérer leurs anciens logements. Mais les tribunaux israéliens, qui approuvent les revendications des colons, ne tiennent aucun compte des demandes de restitution émises par les Palestiniens. Au fur et à mesure de ces expulsions, se constituent des sorte d'enclaves colonisées au sein des quartiers musulman et chrétien de la vieille ville. Autres moyens utilisés par la municipalité de Jérusalem pour inciter les populations palestiniennes à partir : la multiplication des décisions de démolition pour habitat "insalubre" et le rationnement des permis de construire.

Cette scandaleuse politique d'apartheid a été dénoncé en 2009 avec une certaine vigueur  par les consulats européens présents à dans la vieille ville arabe. Selon leur dernier rapport, Israël "a poursuivi, par des moyens pratiques son annexion illégale de Jérusalem-Est en affaiblissant la communauté palestinienne de la ville, en empêchant le développement urbain des Palestiniens et, au bout du compte, en séparant Jérusalem du reste de la Jordanie". Selon ce document, cette stratégie israélienne à long terme, appliquée à un rythme accéléré, vise à affaiblir la perspective d'une capitale palestinienne à Jérusalem-Est et poursuit une politique délibérée visant à rendre progressivement impossible une solution à deux Etats.

La situation est devenue suffisamment intolérable pour que l'Union Européenne s'en saisisse au plan politique. A l'initiative de la Suède, qui mène depuis plusieurs mois une action diplomatique résolue contre les boutefeux du gouvernement israélien, les ministres des affaires étrangères de l'Union ont approuvé le 8 décembre dernier une déclaration commune appelant à ce que Jérusalem devienne "la future capitale de deux Etats, palestinien et israélien, dans le cadre d'un règlement négocié". Ils ont dit "leur vive préoccupation face au blocage du processus de paix au Proche Orient, et réaffirmé n'avoir jamais reconnu l'annexion de Jérusalem-Est en 1967 par l'Etat hébreu" ni les changements de frontières imposés par la force à cette date. La résolution proposée par la Suède était d'ailleurs plus explicite sur le statut futur de Jérusalem-Est, ce qui aurait permis de légitimer les actions engagées au plan du droit international par les Palestiniens expulsés. Les réserves émises par les défenseurs habituels du gouvernement israélien au sein de l'Union, Allemagne, Italie, Pays Bas - auxquels la France s'est associée, au mépris de ses positions constantes sur Jérusalem Est - n'ont malheureusement pas permis d'être aussi explicite.

La réaction des européens est-elle de nature à faire changer d'orientation le gouvernement Nétanyahou? On peut sérieusement en douter. Israël, qui n'est plus aujourd'hui à une provocation près vis à vis de la communauté internationale - a dévoilé fin décembre un projet de construction de 700 nouveaux logements dans des secteurs de Cisjordanie proches de Jérusalem Est. Malgré de nouvelles protestations de l'Autorité palestinienne et des Etats Unis, les appels d'offre concernant ce programme viennent d'être confirmés par le ministère israélien de la construction. Un important dispositif policier et militaire est prévu pour assurer la sécurité des chantiers.

L'affaire de Jérusalem-Est peut avoir des conséquences de grande ampleur. A la fois  parce qu'elle met à nouveau la population palestinienne sous tension, à la merci des extrémistes. Et parce qu'elle confirme quelque part le désarroi et la confusion qui règnent au sein du cabinet israélien. M. Nétanyahou, qui doit sa survie politique aux groupes religieux les plus extrêmes, en est réduit à naviguer à vue. Au point de ne pas mesurer à quel symbole il s'attaque en ouvrant ses chantiers dans la vieille ville arabe. Au point de ne pas voir la nouvelle donne diplomatique qui s'esquisse dans la région - retour de la Syrie, poids de la Turquie, changement d'orientation de la politique américaine, influence de la Russie - qui est en train de modifier très profondément les rapports de force, en défaveur d'Israël. Le vent tourne au Proche-Orient. Il serait temps que les responsables israéliens en prennent conscience. Avant qu'il ne soit trop tard.

Claude Ares.


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8 janvier 2010 5 08 /01 /janvier /2010 11:00
Fallait-il faire l'âne pour avoir Besson ?

Ce billet s'adresse en premier lieu aux responsables des journaux ou des sites de la mouvance souverainiste ou traditionaliste qui ont cru bon de faire écho au débat sur "l'identité nationale" et qui s'en mordent aujourd'hui les doigts.

La Revue critique.

 

Emmanuel Todd faisait, il y a quelques jours sur FR3, le procès de tous les faux débats, fausses réformes, fausses ruptures dont le sarkozysme nous a abreuvés depuis 2007. La liste en est longue. Et dans chacun des cas le débat politique a été instrumentalisé, pris en otage, détourné par le même petit groupe de sous-politiciens, d'experts stipendiés et de communicants qui assènent leurs idées courtes et leurs vérités simples sur la société française, comme si nous étions revenus à l'époque de Joseph Prudhomme. La république chiraquienne nous avait offert comme maîtres à penser Baverez, Minc et Fitoussi, ce qui était assez pitoyable.  Nous avons maintenant Besson, Hortefeux, Estrosi, Brice Teinturier et Patrick Buisson, ce qui est franchement pire. "Le retour des idiots", résumait Todd d'une formule. Nous préférons, quant à nous, celle du "gouvernement des imbéciles", plus conforme à  notre fidélité à Bernanos et à Léon Daudet. Mais il s'agit finalement de la même chose.

Parmi les controverses lancées l'an dernier par le gouvernement, celle sur l'identité nationale a battu tous les records de stupidité. Elle semble avoir fait long feu. Si l'on en croit les gazettes, y compris celles qui mangent dans la main du pouvoir, le vaisseau Besson commence à couler par le fond. Selon le dernier sondage réalisé par CSA avant Noël, deux Français sur trois souhaitent qu'on tire un trait sur ce débat calamiteux, qui nous range au même niveau que la Suisse. A l'exception du chef de l'Etat et de son ministre de "l'intégration nationale" qui persistent, signent, et nous promettent une poursuite des festivités jusqu'à mi 2010, les rats commencent à quitter le navire, ce qui est généralement mauvais signe. Alain Juppé, Jean-Pierre Raffarin, les villepinistes ont déjà pris leurs distances. Le groupe parlementaire UMP et les députés du Nouveau centre ont discrètement demandé à François Fillon d'abréger leurs souffrances. Les élus locaux désertent à pleines brassées les réunions organisées par les préfets, quant ils n'organisent pas eux-mêmes leur boycott.

Ce qui inquiète en réalité ce petit monde, c'est que l'opinion réagit mal sur le terrain. Entre ceux des Français qui ont parfaitement flairé les raisons  électoralistes de cette initiative, ceux qui considèrent qu'il s'agit d'une énième manoeuvre de diversion pour éluder le débat sur la crise, et ceux qui refusent de résumer l'appartenance à la nation à des questions de race ou de religion, il ne reste plus grand monde pour jouer le jeu. Le dernier carré - essentiellement des personnes âgées, nous dit-on - a toutes les chances de préférer "l'original à la copie", selon la formule bien connue de M. Le Pen. Autant dire que les farces et attrapes de M. Besson ne font plus recettes chez nos dirigeant umpistes, surtout à quelques semaines d'échéances électorales de première importance. De là à ce qu'on trouve au Ministre de nouvelles occupations, il n'y a qu'un pas. Un peu de courage, que diable, il faut le franchir!

Cherchons, malgré tout, à dégager quelques enseignements de ce débat, même s'il se termine en pantalonnade. On a beaucoup commenté les risques qu'il comportait, du fait de questions mal posées. Inutile d'y revenir. En revanche on n'a pas assez insisté sur le fait que  l'intitulé  lui-même du débat posait problème.  Identité nationale ? Comme si la France, si riche, devait se résumer à une quelconque identité, comme si les Français avaient vocation à se ressembler, comme de tristes objets issus d'une même série, comme des numéros enfermés dans la même boite. Ce qui caractérise en réalité la France, lorsqu'on consulte les bons manuels, c'est son incroyable diversité, géographique, sociale, humaine et culturelle. C'est sa capacité à rassembler des talents divers, des hommes du nord et du sud, des montagnards, des marins et des terriens, à rameuter chez nous des gens venus d'ailleurs, pour certains de très loin, désireux d'apporter  leur part de rêve au rêve national. Diversité française dans l'unité française: voilà la difficile alchimie qu'à su construire ce pays depuis deux millénaires, depuis que nous avons reçu en héritage une partie du patrimoine, lui aussi éminemment cosmopolite, de l'immense empire des grecs et des latins. Diversité et unité:voilà qui est nôtre, notre part de civilisation, notre façon de contribuer au génie humain.

Diversité, unité, c'est à dire projet collectif. Car il n'y a que le mouvement qui puisse faire tenir ensemble toutes les composantes de la diversité française. Comme le soulignait si finement et si justement le rabbin Berheim dans la belle contribution qu'il a donné fin novembre au Monde (cf. RCIL du 23 décembre 2009), la France n'est pas, ne peut pas être simplement un patrimoine que nous recevons en héritage, il faut que nous en fassions une idée vivante, utile au monde d'aujourd'hui. "La France par le rêve" : telle est la formule que Gilles Berheim propose et que nous avons envie de faire nôtre. Pendant les périodes difficiles de notre histoire, ce rêve français fut celui du combat commun, des victoires, des misères et des défaites que nous partagions ensemble. On le retrouve tout entier dans le superbe slogan dont de Gaulle ponctua en 1942 son célèbre discours de l'Albert Hall: "Un seul combat pour une seule patrie!" (1) Et puis le rêve français, ce fut la Libération, la reconstruction, cette explosion des énergies nationales qui marqua, au moins dans ses débuts, la république gaullienne. Ce fut aussi, durant trente ans, la construction européenne, jusqu'à ses dérives maastrichiennes, puis lisbonnardes.  

La vraie question, la seule qui devrait faire aujourd'hui débat, c'est l'incapacité de notre classe politique à proposer quelque projet que ce soit. C'est vrai du sarkozysme qui illustre dans toute sa vacuité et jusqu'à la caricature l'état de décomposition intellectuelle qui caractérise la droite française depuis la fin du gaullisme. C'est vrai aujourd'hui de la gauche de gouvernement, elle aussi sans projet autre que gestionnaire et ralliée sans conditions à la nouvelle vulgate du développement durable. Tant que ce seront les mêmes, issus des mêmes écoles, de la même oligarchie, qui tiendront la plume pour rédiger les mêmes discours et les mêmes programmes, rien ne changera vraiment. Inutile de chercher, ce constat politiquement incorrect ne figure pas dans les attendus du débat proposé par M. Besson.

Le salut viendra sans doute d'ailleurs. En agitant le fantasme de l'islamisme, en grossissant à souhait la question du foulard et aujourd'hui de la burqa, le gouvernement ne cherche pas  seulement à jouer sur les peurs rentrées de la société française. Il agit aussi en honnête serviteur de cette vieille morale républicaine, uniformisatrice, pour qui l'appartenance religieuse est depuis toujours un obstacle de principe à l'identité nationale. C'est cette vision sectaire, archaïque, appauvrissante de la laïcité, qui conduit à mettre au ban de l'école et parfois à rejeter hors du débat politique ceux de nos concitoyens qui se réclament d'une appartenance spirituelle. Bon nombre de responsables chrétiens, juifs ou musulmans refusent aujourd'hui cette logique. A l'occasion du débat Besson, ils ont une nouvelle fois exprimé leur rejet de toute  "confrontation des religions" et leur volonté au contraire de promouvoir ensemble les valeurs spirituelles dont ils sont porteurs. Gageons qu'il y a là une des sources du projet français que nous appelons de nos voeux.

  Paul Gilbert.

 


(1). Général de Gaulle, Discours du 11 Novembre 1942, Albert Hall de Londres.

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5 janvier 2010 2 05 /01 /janvier /2010 11:30
Les royalistes                           
et Napoléon     
1799-1816               

 

de Jean-Paul Bertaud
Mis en ligne : [4-01-2010]
Domaine : Histoire

Les royalistes et Napoléon-copie-1 

Professeur émérite en Sorbonne, Jean-Paul Bertaud est l'un des grands spécialistes français de la Révolution et de l'Empire. Il est notamment l'auteur de : Le Consulat et l'Empire (A. Colin, 1992), Les Causes de la Révolution (A. Colin, 1992), L'an I de la République (Perrin, 1992), Guerre et Société en France de Louis XIV à Napoléon Ier (A. Colin, 1998), La Presse et le Pouvoir de Louis XIII à Napoléon Ier (Perrin, 2000), Le Duc d'Enghien (Fayard, 2001), Choderlos de Laclos (Fayard, 2003), Quand les enfants parlaient de gloire (Aubier, 2006).


Jean-Paul Bertaud, Les royalistes et Napoléon , Paris, Flammarion, Avril 2009, 464 pages.


Présentation de l'éditeur.
Au matin du 21 janvier 1800, les ouvriers et les bourgeois qui longent la Madeleine s'arrêtent, interdits. Sur la façade de l'église s'étend un drap de velours noir portant des mots terribles: "Victimes de la Révolution, venez avec les frères de Louis XVI déposer ici vos vengeances." Qui ose, en plein Consulat, rappeler le souvenir du roi guillotiné sept ans plus tôt? L'homme qui a bravé la police de Bonaparte et de Fouché s'appelle Jean-Guillaume Hyde de Neuville. Avec Georges Cadoudal et tant d'autres, il est l'un des innombrables héros de cette geste royaliste qui a fait trembler le Consulat, puis l'Empire. Car bien des nobles se rallieront à l'Empereur, conquis par les honneurs ou vaincus par l'ennui; beaucoup oscilleront, quinze années durant, entre ce qu'on pourrait appeler résistance et collaboration... Mais les fervents du roi, eux, ne céderont jamais. Napoléon a eu l'insolence d'écrire à Louis XVIII qu'il lui faudrait, pour revenir en France, "marcher sur cent mille cadavres"? Les royalistes de c?ur feront tout pour rendre ce retour possible: inscriptions tracées à la craie sur les murs des villes, distribution de tracts et de pamphlets incendiaires, attentats et enlèvements, attaques de diligences, noyautage de la police et de l'armée, réseaux d'espionnage et de contre-espionnage... Des salons parisiens au bocage vendéen, ce livre déroule une fresque inouïe, pleine de bruit et de fureur.

Recension. - L'Histoire, Septembre  2009..
Les deux France. Etre un vrai royaliste, entre 1799 et 1814, c'est se placer derrière la personne du roi, contre vents et marées. C'est un temps où des figures fortes émergent, comploteurs au grand jour ou agents de l'ombre tels Pichegru, Cadoudal ou Hyde de Neuville. Contre une historiographie qui considère les royalistes du point de vue napoléonien, Jean-Paul Bertaud, dans un ouvrage instructif et captivant, resitue ces apparents perdants de l'histoire dans une dynamique moins défavorable. En 1801, le Concordat et la paix avec l'Autriche, la Russie et l'Angleterre marginalisent les royalistes, tandis qu'un climat délétère s'installe entre le roi Louis XVIII et son frère le comte d'Artois. Dès 1804, "l'air est plein de poignard", à nouveau. Ce sont toutefois les balles du régime qui auront le dernier mot: "frappé de la foudre", selon le mot de Napoléon, le duc d'Enghien périt à Vincennes;"l'un des points d'orgue du duel des deux Franced engagé depuis 1789", mais aussi le signe du danger permanent qui pèse sur un régime mal assuré. D'où le mot de Regnaud de Saint-Jean d'Angély : "Les royalistes veulent tuer tuer Bonaparte, il faut le défendre et le rendre immortel..." Ce sera le sacre - puis le ralliement de beaucoup de royalistes.  L'auteur décrit aussi les débats politiques enfiévrés qui scellent le sort de la France, en 1814 et 1815. En quelques pages claires et pénétrantes, on voit naître le parlementarisme en France : "un roi national régnant sur une France royale" d'après Montlosier.

 

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1 janvier 2010 5 01 /01 /janvier /2010 17:15

Hiver 2009/2010
La place
de la France
 

Les idées et les livres

- Joyeux Noël à la Maison de France, par Georges Bernanos. [lire]
La préciosité est de retour. Madame de Lafayette trouve à nouveau le chemin du coeur des enfants du siècle et Honoré d'Urfé, si oublié, est à la mode. L'occasion de retrouver un charmant texte de Pierre Gilbert publié en 1910 et qui n'a pas pris une ride. Eternelle jeunesse de l'amour courtois. 

- Retour des nations (3). - La place de la France, textes présentés par V. Maire.
L'affaiblissement de l'empire américain, l'émergence de la Chine, de l'Inde et du Brésil, le réveil de la Russie et la perte de confiance dans la construction européenne commencent à dessiner les contours d'un autre monde, sans puissance hégémonique, où le jeu s'ouvre à nouveau entre les peuples. Cette réalité, que la crise financière internationale rend soudain parfaitement visible, a été imaginée et pensée depuis une dizaine d'années par des groupes d'intellectuels venus de toutes les disciplines. L'avenir qu'ils anticipent est celui d'un retour des nations.

- Le souvenir de Montcalm, par François Renié. [lire]
En 1663, François Le Tellier, marquis de Louvois, devient secrétaire d'Etat à la guerre. Ingénieux, organisé, doté d'une énorme puissance de travail, il permet en vingt ans à Louis XIV de réformer les armées et de faire de la France la première puissance militaire d'Europe. Malgré l'incendie du Palatinat et les dragonnades, dont il ne fut pas seul responsable, son bilan est impressionnant et les effets de sa politique se feront sentir jusqu'au milieu du XIXème siècle. Portrait d'un homme d'Etat.

- Le voyage en Grèce, une fantaisie d'Eugène Marsan. [lire]
Et si La Fontaine avait mal tourné? Et s'il avait ajouté à ses vers, à son goût du libertinage et de la paresse, la rapine, le brigandage et le larcin. Qu'on se rassure : dans ce petit pastiche très XVIIème siècle, Jules Lemaître veille au grain et notre Jean reste dans les immoralités convenables. A déguster.

- Le jardin français, poèmes de Touny-Léris, H. Martineau, L. P. Fargue. [lire]

Chroniques

- Notes politiques, par Hubert de Marans.
L'affaire Proglio. - Nominations européennes. - Le congrès de la CGT. 

- Revue des revues, par Paul Gilbert.
Retour de la question sociale. - Le laid Paris.

- Idées- Histoire, par Vincent Maire.
Quelques livres sur Proudhon.

- Les livres, par Eugène Charles, François Renié.
Lettres de château (Michel Déon). - Une histoire politique de la littérature (Stéphane Giocanti). - Petite sélection stendhalienne. - Livres reçus.

 

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1 janvier 2010 5 01 /01 /janvier /2010 14:20
bainville
 
1610-2010 : hommage à Henri IV
 

L'équipe de la Revue Critique des idées et des livres présente à Mgr le Comte de Paris, à la Maison de France, à ses lecteurs et à tous ses amis ses voeux de bonheur et de prospérité pour l'année 2010.

 

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31 décembre 2009 4 31 /12 /décembre /2009 16:22

 

Zig-et-Puce-copie-3.jpg

 

La Revue critique vous souhaite
une belle année 2010

 

 

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29 décembre 2009 2 29 /12 /décembre /2009 11:00
Les fêtes
avec Stendhal                       
la chartreuse de parme

 

La Revue critique des idées et des livres souhaite à ses lecteurs de bonnes fêtes de fin d’année et leur adresse ses meilleurs voeux pour 2010. Nous reprendrons notre rythme de publication régulier à partir du mardi 5 janvier. En attendant, nous vous proposons une petite sélection d'essais, récents ou moins récents, sur Stendhal qui vous feront terminer l'année et commencer la suivante de la meilleure façon.


Petite sélection stendhalienne

Stendhal, par Sandrine Fillipetti (Folio biographies, février 2009, 336 p.). Excellente biographie, à la fois précise et pleine de charme. Sandrine Fillipetti connaît son grenoblois par coeur. Elle a de la tendresse pour le jeune (et bref) officier de cavalerie et pour le consul mélancolique de Civita-Vecchia. Elle regarde avec un oeil malicieux et à qui rien n'échappe l'éternel ami des femmes dans ses bonnes et ses moins bonnes fortunes. Tout celà écrit dans un style enlevé. Que du plaisir.

Stendhal et l'Amérique, par Michel Crouzet (Editions de Fallois, avril 2008, 288 p). Par un des meilleurs connaisseurs de l'oeuvre stendhalienne. Stendhal a rêvé l'Amérique, même s'il n'y a jamais mis les pieds. "Ce pays singulier, où l'homme n'est mû que par trois idées : l'argent, la liberté et Dieu", voilà d'une formule sa vision d'une contrée qui lui inspire à la fois de l'admiration, de la crainte et de la répulsion. Gageons que Beyle n'aurait pas aimé Bush, qu'il ne serait pas dupe d'Obama et que la démocratie américaine actuelle n'aurait aucun attrait pour lui (il désignait déjà à son époque le peuple souverain américain comme "le tyran aux mains sales"). A l'inverse,  la modernité le fascinerait... ainsi que certaines actrices qui valent le détour. Rassurez vous, le livre est plus sérieux que mon commentaire !

Portraits de Stendhal, par Thierry Laget (Gallimard, L'un et l'autre, janvier 2008, 210 p.). Une cinquantaine de croquis pris sur le vif, à la façon de Beyle, et à partir des notes de Beyle. C'est intelligent, renseigné et parfaitement écrit. Et on y cueille presque à chaque page une formule suffisante pour nous enchanter toute une journée. Ainsi "l'ombre des beaux arbres, la beauté du ciel pendant les nuits, l'aspect de la mer, tout a pour moi un charme, une force d'impression qui me rappelle une sensation tout à fait oubliée, ce que je sentais, à seize ans, à ma première campagne. C'est comme de l'amour et cependant je ne suis amoureux de personne".

Filosofia Nova, Marginalia, par Stendhal (Ressouvenances, juillet 2009, 334 p.). Une idée magnifique : la réédition de deux recueils de notes de Stendhal, l'un rédigé pendant sa jeunesse et l'autre qui couvre une période plus longue, les deux publiés par les soins d'Henri Martineau pendant l'entre deux guerres. Une véritable mine  de formules, d'idées, de descriptions que Beyle conservait dans les marges de ses livres et qui lui servait de "magasin" pour la rédaction de ses oeuvres. Le livre de cuisine du créateur.

Pour les amateurs de beaux textes sur Stendhal, on se mettra en quête ou (plus sûr) on se fera offrir :
- Stendhal
,
par Claude Roy (Ecrivains de toujours/Seuil, 1951, 192 p.). Les commentaires d'un grand amateur.
- Stendhal comme Stendhal,
par Jacques Laurent (Grasset, 1984, 286 p.). A servir glacé avec le meilleur Champagne!
- Stendhal célébré
à CivitaVecchia,
par Eugène Marsan (Champion, Les amis d'Edouard, 1925). Rare. Belle récompense pour chercheur obstiné.

Enfin, pour ceux qui, même dans la fête, ne se départissent jamais d'un certain sérieux, nous recommandons la lecture de la revue de référence, la seule, la vraie, l'unique, l'Année Stendhalienne (1). Sa livraison de 2009 est précisément consacrée à Stendhal et la femme, thème festif s'il en est. On lira avec toute la gravité et toute l'application qui s'imposent l'article de Béatrice Didier, la femme du XVIIIe siècle selon Stendhal. Après quoi, on se dirigera d'un pas décidé, mais sans précipitation excessive, dans le petit salon voisin, où nos amies nous attendent...

Eugène Charles.



(1). L'Année stendhalienne, n°8 - 2009, Stendhal et la femme. (Librairie Honoré Champion, 3 rue Corneille, Paris 6e)

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Revue trimestrielle
N°1 - 2009/01
 
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