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13 novembre 2009 5 13 /11 /novembre /2009 19:42
Abondance de biens         
ne nuit pas
 

Vous avez perdu vos dernières illusions sur le Goncourt en découvrant Marie Ndiaye et ses Trois femmes puissantes ? Beigbeder vous insupporte et vous ne lirez jamais son "Roman français", même couronné par le Renaudot ? Eh bien, rassurez vous ! Les librairies sont pleines de choses qui peuvent vous consoler, certaines tout à fait sérieuses et d'autres parfaitement charmantes. Prenez Michel Déon par exemple. Il savait que la saison serait mauvaise pour les prix littéraires et qu'il fallait très vite nous faire changer d'air. Il arrive, précédé comme d'habitude par sa petite musique, mais cette fois ci, il ne vient pas tout seul. Il se met même en trois pour nous satisfaire. Trois beaux Déon, qui sortent tout chaud de chez l'imprimeur, c'est de la gourmandise, presque du vice. - Pensez donc ! Quod abundat non vitiat.

Le premier de ces petits présents du ciel est un journal [1] ou plus précisément les pages choisies d'un carnet de notes qui court de 1947 à 1983. N'allez surtout pas croire que Déon va vous livrer quoi que ce soit de ses secrets. Il a beau déclarer que " tenir un journal aide peut-être à croire à sa propre existence", l'existence qui l'intéresse c'est celle des autres, de ces mille autres rencontrés au hasard d'une vie, écrivains, politiques, cinéastes, vieilles gloires ou jeunes talents, croisés dans un dîner, un avion ou au bord d'un lac italien. Déon est excellent dans la prise de notes. Il sait croquer n'importe quelle célébrité en trois phrases et on voit qu'il a été élevé à l'école de Stendhal, celle de la vitesse. Ses personnages se meuvent tout seuls. On a juste à les écouter ou à les suivre. Ainsi d'Eva Peron à Saint Moritz qui lui refuse un interview, "tend sa main baguée et s'en va dans un nuage de parfum"; ainsi de cette rencontre à Venise avec Margherita Sarfati, ancienne égérie de Mussolini, vieille dame fantasque qui l'entraîne jusqu'à l'Accademia chez un jeune peintre communiste, son nouveau protégé. Au détour d'une page, on  croise Léautaud et Benda, "affreux vieillards", Edwige Feuillère, "son visage très beau, l'élégance de son long cou qui eût enchanté Van Dongen", André Fraigneau, Jean Cocteau, Jacques Chardonne et Paul Morand, pleins d'élégance. Et bien sûr cette nuée d'amitié qui siège en permanence au dessus de la tête de Michel Déon et qui égaie les soirées parisiennes et les plus beaux sites de Grèce, d'Italie ou du Portugal.

Après le carnet de croquis, voici que Déon nous offre, sous le titre Lettres de château[2], un recueil d'études plus minutieuses. C'est l'occasion pour lui de retourner le miroir : les écrivains, les peintres nous proposent des vies par procuration, faites d'une multitudes d'images volées à la vraie vie. Mais "qui est réellement derrière le récit, tantôt invisible et secret, tantôt irritant et tonitruant, qui est le magique créateur de ces vies?" Cette question ne souffre pas les platitudes théoriques, elle appelle les travaux pratiques et comment mieux les pratiquer qu'en les appliquant aux artistes et aux auteurs que l'on aime. Qu'est ce qu'une lettre de château, sinon ce témoignage d'amitié que l'on adressait à ceux qui vous avait bien reçu, au temps où la démocratie n'avait pas encore fait disparaitre la politesse? Tel est le style de ces dix petits essais, purement subjectifs, qui sont d'abord des témoignages d'admiration et de reconnaissance. Qu'ont en commun Larbaud, Conrad, Giono, Stendhal, Toulet, Apollinaire et Morand? Quelle mystérieuse alchimie du goût peut relier Poussin, Manet et Braque ? Un amour de la vie, une grande curiosité pour le monde, le sens de la beauté, de la grandeur et de l'éternité, une certaine élégance aussi. Déon a raison de dire que nous sommes "les enfants soumis ou rebelles" des oeuvres qui ont enchanté notre enfance. Le panthéon qu'il nous présente est à l'image de son oeuvre. Il est aussi à l'image d'une certaine civilisation, toute classique et française, qui continue à nous nourrir, presque malgré nous. 

Terminons par un hommage, celui que les Cahiers de l'Herne[3], dans une splendide livraison, viennent de rendre à l'auteur du Rendez-vous de Patmos. Il y a là une trentaine de très beaux textes réunis avec le plus grand goût par Laurence Tacou, prêtresse inspirée des éditions de l'Herne. On y trouve de grands vivants comme Milan Kundera, Olivier Frébourg, Emmanuel Carrère, Eric Neuhoff, Patrick Besson, Félicien Marceau, Frédéric Vitoux, ou Jean d'Ormesson, réunis par l'amitié et par le talent. On y trouve bien sûr le souvenir de tous les amis disparus: Blondin, Jacques Laurent, Roger Nimier, André Fraigneau, Chardonne, Morand, tous restitués de pied en cape. Une sélection de textes de Déon, parmi lesquels un hommage émouvant à Charles Maurras, maître de sa jeunesse, à l'occasion de la restauration du Chemin de Paradis. Et pour finir quelques extraits de correspondance, dont deux lettres assez fines signées ... François Mitterrand ("Vous n'aimez guère ma politique. J'aime vos livres," lui écrit l'ancien Président de la République).

Avec tout cela, nous voilà armés pour passer l'hiver, loin des miasmes de la grippe et de la mauvaise littérature !

Eugène Charles.



[1]. Michel Déon, Journal 1947-1983. (Editions de l'Herne, septembre 2009, 139 pages).

[2]. Michel Déon, Lettres de château. (Gallimard, NRF, août 2009, 168 pages).

[3]. Cahiers de l'Herne n°91: Michel Déon, dirigé par Laurence Tacou. (Editions de l'Herne,  2009, 276 pages).

 

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11 novembre 2009 3 11 /11 /novembre /2009 18:40
Fin de partie ?

On se serait bien passé de cette première décade de novembre ! Mardi 6 novembre, le président tchèque, à bout d’arguments et la mort dans l’âme, qui est obligé de signer le traité européen ; le triomphe particulièrement peu modeste de la Commission et de la présidence suédoise qui annoncent dès mercredi que le traité rentrera en vigueur le 1er décembre prochain. Et M. Cameron, le chef de file des tories, qui enterre vendredi  sa promesse d’organiser un référendum sur Lisbonne. Voilà bien des espoirs balayés en quelques jours ! 

Ce résultat est évidemment un crève-cœur pour les millions d’européens libres qui avaient fini par se faire à l’idée qu’il était possible d’échapper aux griffes de l’Europe bruxelloise. Nous voici ramenés à une triste réalité, avec l’obligation de subir le tintamarre de l’eurocratie triomphante. Et de retrouver à nouveau les miasmes de la démocrassouille européenne, toute à ses mic-macs et à ses marchandages et qui va pouvoir, enfin, s’en donner à cœur joie.

Même si le réveil est un peu brutal, nous aurions tort de sombrer dans la morosité et le désespoir. C’est une bataille qui a été perdue, pas la guerre. Le conflit qui oppose aujourd’hui les peuples d’Europe et leurs élites défaillantes ne fait que commencer. Il s’étendra sans doute sur plusieurs décennies. Comme il a fallu plusieurs décennies pour accoucher du monstre que nous appelons aujourd’hui l’Union européenne, il en faudra plusieurs pour tout rebâtir, jusqu’aux fondations, si l’on veut voir émerger l’Europe libre que nous appelons de nos vœux. . 

L’heure est maintenant aux bilans et il y a au moins trois leçons à tirer de cette étape. 

La première, c’est que le rapport de force a réellement changé. Nous ne sommes pas passés très loin du succès et il s’en est fallu de quelques mois, ce qui est peu au regard des cinq années de crise que vient de connaître l’Europe. Qui aurait pu imaginer il y a seulement dix ans, que trois nations – la France, les Pays Bas et l’Irlande- rejettent aussi massivement les diktats européistes, que les Allemands, les Britanniques, les Autrichiens, les Tchèques, les Roumains, voire les Grecs, les auraient sans doute aussi rejeté, s’ils avaient été loyalement consultés ? Qui aurait pu prévoir les résultats calamiteux des dernières élections européennes, leur taux de participation ridicule, la désaffection qu’elles expriment pour l’Europe telle qu’elle se construit ? Oui, les choses ont bougé, les « puissances de sentiment », comme disait Barrès, sont en train de changer de camp, le vent de l’histoire souffle à nouveau dans notre sens. 

Deuxième leçon, l’origine de nos malheurs est d’abord française. Certes, la ratification de Lisbonne n’est  pas seulement l’œuvre de Sarkozy et de son clan. L’Allemagne, le Benelux, l’Italie, d’autres y ont leur part. Mais leur attitude était logique. Le Benelux ou l’Italie ne sont rien sans l’Europe. L’Allemagne va tirer de grands profits du nouveau traité, notamment au travers du poids politique renforcée qu’il lui donne. Rien de tel pour la France. Si le chef de l’Etat, son gouvernement, sa majorité, ont pris la tête de cette croisade, c’est pour l’esbroufe, par incurie ou, pire, pour certains, comme MM. Kouchner, Jouyet et Lellouche, par idéologie. On retiendra qu’à quelques exceptions près, personne au sein de la droite française ne s’est élevé contre ce projet. Où sont les gaullistes, les patriotes d’hier ? disparus, évanouis. Quant aux socialistes, leur véritable trahison lors de la réunion du Congrès de 2008, alors qu’ils auraient pu imposer au pouvoir un nouveau référendum, n’est pas prête d’être oubliée. 

Enfin, dernière leçon, le succès sera au prix de profonds changements de stratégie. Le vieux souverainisme est mort. Ses visées purement défensives, son incapacité  à sortir des cadres nationaux, à s’appuyer sur des forces sociales, à offrir des perspectives nouvelles sont à l’origine de ce décès. Il n’y a pas lieu de le regretter, de même qu’il n’y a pas lieu de regretter le reclassement des personnalités qui, notamment en France, l’ont personnifié. Il faut désormais fédérer les peuples sur autre chose, sur un vrai contre-projet à l’échelle du continent. C’est bien sûr celui de l’Europe des nations, avec ses leaders à trouver, ses institutions politiques à esquisser, ses frontières à imaginer, sans doute jusqu’à la Turquie et jusqu’à la Russie. Ces perspectives  prennent actuellement forme dans le débat intellectuel et pas simplement en France. Accélérons ce mouvement.

 

François Renié.


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11 novembre 2009 3 11 /11 /novembre /2009 11:00
Aux morts de la Revue critique

 

En ce jour de célébration de la victoire, et alors que des esprits faux, futiles et sans mémoire célèbrent " l'amitié franco-allemande", notre première pensée sera pour les morts de la Revue critique des idées et des livres, pour ses vingt quatre rédacteurs tués à l'ennemi, disparus ou morts sous les drapeaux entre 1914 et 1918. La Revue critique a payé un des plus lourds tributs de la presse de l'époque. Elle était l'aile avancée de toute une génération, d'une jeunesse marquée par le retour des idées nationales et classiques, d'une génération que la France avait à nouveau enchantée.

Le 2 août 1914, La Revue critique bouclait son dernier numéro d'avant guerre. Pierre Gilbert, qui faisait office de rédacteur en chef, rédigeait en toute hâte un avertissement aux lecteurs, avant de rejoindre ses camarades déjà mobilisés. Ce petit texte garde, un siècle après, toute sa charge d'émotion :

A nos lecteurs. A l'heure où nous portons sur des épreuves imparfaites le bon à tirer d'un numéro forcément réduit, l'Etat français a donné l'ordre de mobilisation générale et les premières hostilités ont eu lieu. La publication de la Revue se trouve suspendue. Les rédacteurs de la Revue prennent congé de leurs lecteurs pour prendre leurs places sous les drapeaux.

Son ami Eugène Marsan n'avait pu s'empêcher de clore l'avertissement par un vibrant "Vive la France!". Mais Gilbert d'effacer cette dernière ligne : - Quelle idée ! Cela va de soi…

TUES A L'ENNEMI :

- Maurice Luthard: le 18 août 1914, en Lorraine, " avec le plus grand mépris du danger."
- Germain Belmont
(Charles Deschars), aux armées de première ligne sur sa demande : blessé le 22 août 1914, assassiné le 23 à l'ambulance, par un sous-officier allemand, comme il s'efforçait d'empêcher le massacre des autres blessés. 

- Robert Cernay (Robert de Fréville de Lorme) : le 1er septembre 1914.

- Gustave Valmont : le 6 septembre 1914, à la bataille de la Marne.

- Pierre Gilbert (Pierre Gilbert Crabos) : le 8 septembre 1914, à la bataille de la Marne.

- Alfred de la Barre de Nanteuil: lieutenant de vaisseau, à la brigade de l'Yser sur sa demande: mortellement blessé le 10 novembre 1914 à Dixmude.

- Charles Benoit : le 28 décembre 1914, en s'exposant aux créneaux, "pour mieux viser"

- Marcel Drouet, secrétaire de la rédaction des Marches de l'Est : le 4 janvier 1915, à Consenvoye, devant Verdun.

- Lionel des Rieux, sur la ligne de feu, à sa demande : le 27 février 1915, à l'assaut de Malancourt.

- Prosper Henri Devos, le jeune romancier belge : blessé et fait prisonnier sur l'Yser, mort dans un lazaret allemand.

- Jean-Marc Bernard, engagé volontaire : le 4 juillet 1915, à la bataille de Carency, "d'une balle au front".

- Edouard Deck.

- Joseph de Bonne : le 25 septembre 1915, à la tête de sa section.

- Henri Lagrange : le 30 octobre 1915, mortellement blessé au combat d'Auberive.

- Jean d'Aulon (commandant Paul de Mougins-Roquefort). Blessé au combat de Vauquois, il reste volontairement sur le champ de bataille; étendu sur une civière, il continuait d'encourager ses hommes, lorsqu'un éclat d'obus l'atteignit mortellement.

- Raoul Monier, engagé volontaire: le 4 juillet 1916, devant Thiaumont, un an, jour pour jour, après son ami le poète Jean-Marc Bernard. 

- Henry de Barrès.

- Yves de la Mardière: le 5 avril 1918, à l'attaque de Grivesnes, à la tête de sa section.

DISPARUS :

- André du Fresnois : en septembre 1914, au combat de Courbessaux.

- Henry Cellerier : le 27 septembre 1914, à l'assaut de Montauban-sur-Somme.

- Pierre Rousselot, de la Compagnie de Jésus : blessé et fait prisonnier le 23 avril 1915. Son dernier mot, en partant pour essayer l'impossible, à son compagnon d'armes hésitant : "Moi j'obéis".

 

MORTS SOUS LES DRAPEAUX : 

- Paul Acker  : le 25 mai 1915, en Alsace reconquise, en service commandé.

- Jean Brichet : le 28 décembre 1918.

- Henry Rouzaud : en septembre 1918.

 

Nos pensées vont plus largement à tous les jeunes qui ont risqué leur vie pour la France dans les deux conflits mondiaux et en particulier à ces milliers d'étudiants qui, au mépris de l'Allemand, ont manifesté le 11 novembre 1940, place de l'Etoile, pour la liberté de la patrie. 
 

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9 novembre 2009 1 09 /11 /novembre /2009 19:30
L'Etat prédateur                   


de James K. Galbraith
Mis en ligne : [09-11-2009]

Domaine : Idées

 

James Kenneth Galbraith, né en 1952, est un économiste américain. Professeur à Lyndon B. Johnson School of Public Affairs et au département de gouvernement de l'Université du Texas, il préside l'association internationale Economists for Peace and Security. J.K. Galbraith est proche de l'aile gauche du parti démocrate américain. Il a récemment publié Le nouvel Etat industriel (2007).


James K. Galbraith, L'Etat Prédateur. Comment la droite a renoncé au marché libre et pourquoi la gauche devrait en faire autant, Paris, Le seuil, Septembre 2009, 311 pages.


Présentation de l'éditeur.
Depuis trente ans, le culte du marché a dominé le discours politique. État modeste, impôts limités, déréglementation et libre-échange sont devenus les maîtres mots de ce dogme dont le succès fut tel qu'il a fini par faire de plus en plus d'apôtres au sein de la gauche. Or, à l'aube du XXIe siècle, nous assistons en Amérique à un drôle de chassé-croisé idéologique. Au moment où la gauche moderne a presque achevé sa conversion au marché libre, la droite conservatrice a définitivement abandonné cette idée. Galbraith montre comment, des années Reagan aux années Bush, la droite au pouvoir a transformé les États-Unis en république-entreprise où l'économie n'est pas régie par les marchés mais par une coalition de puissants lobbies industriels. Ces derniers sont soutenus par un État prédateur qui, loin de limiter l'emprise du gouvernement sur l'économie, entend bien au contraire l'approfondir pour détourner l'action et les fonds publics au profit d'intérêts privés. Si le discours officiel est resté libéral, c'est précisément pour masquer cette forme perverse d'étatisme. La nouvelle gauche libérale s'est laissé contaminer par le culte du marché libre qui n'a jamais été qu'un mythe instrumentalisé par ses promoteurs. Elle serait bien inspirée de se désintoxiquer et de comprendre enfin que les marchés n'apporteront aucune solution à la crise contemporaine, à la pauvreté, aux inégalités, à la crise écologique, tous ces défis qui appellent au contraire la planification, le contrôle public de la répartition des revenus et du financement de l'économie.

La critique de Anne Denis. - Les Echos, 22 octobre 2009.

Ecrit avant l'élection de Barack Obama et la chute de Lehman Brothers, ce livre n'en est pas moins d'une brûlante actualité. En décortiquant l'histoire du néolibéralisme aux Etats-Unis, de sa naissance sous Ronald Reagan à « sa subversion et à son effondrement complet » sous George Bush, il relate aussi « la vie et la mort d'une idée, le marché libre ». Digne héritier de son célèbre père - l'économiste John Galbraith, qui fut conseiller de plusieurs présidents dont Roosevelt et Kennedy -, l'auteur, professeur à la Lyndon B. Johnson School of Public Affairs de l'université du Texas, se définit en achevant son livre fin 2007 comme le « dernier des keynésiens ». Il doit se sentir moins seul aujourd'hui mais reste pessimiste, estimant, dans la préface de l'édition française qui vient de sortir, que « ceux qui espèrent trop, et trop vite, de la nouvelle adminis­tration américaine seront nécessairement déçus ». Car « les forces de l'Etat prédateur sont profondément ancrées dans les deux partis politiques ». De quoi s'agit-il ? Avec l'accession de Reagan au pouvoir triomphe le mythe conservateur qui repose sur quatre grands principes cohérents : monétarisme, économie de l'offre, doctrine de l'équilibre budgétaire et libre-échange. Mais, en pratique, affirme-t-il, ces principes n'ont jamais été appliqués avec rigueur ni succès, notamment en raison du pacte social remontant au New Deal (caisse de retraite, Medicare, universités publiques). Avec George Bush, seule la rhétorique est restée. Les bases conservatrices ont été remplacées par « la capture des administrations publiques par la clientèle privée d'une élite au pouvoir ». L'auteur analyse la dérive des grandes entreprises améri­caines, au regard de scandales de « pillage au plus haut niveau »dont Enron a été la révélation. Pillage directement lié, selon lui, à l'explosion des salaires des PDG. Cette nouvelle classe prédatrice s'est emparée de l'Etat pour le gérer « non pour mettre en oeuvre un projet idéologique » mais « de la façon qui leur rapporte le plus d'argent ». « Alors que la droite au pouvoir a abandonné les fondements philosophiques de sa cause, ceux-ci continuent dans une large mesure à fasciner la ­gauche », déplore Galbraith. Et de citer Hillary Clinton qui s'est sentie obligée de proclamer, durant la campagne des primaires, qu'il n'y avait pas de force plus puissante que le marché libre… Galbraith veut donc « libérer les esprits de gauche ». Une gauche qui manque tragiquement, selon lui, d'imagination. « L'assurance-maladie, figure en tête du programme progressiste depuis… 1948 ! » L'auteur appelle donc les démocrates à revenir sans complexe à la planification et au contrôle de la répartition des revenus, et les exhorte surtout à un plus grand volontarisme. Peu de propositions concrètes. Mais peut-être ­James Galbraith préférera-t-il, dans les ­traces de son père, essayer de chuchoter ses idées à l'oreille d'Obama.

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8 novembre 2009 7 08 /11 /novembre /2009 14:00
 Les tartelettes 
   
amandines


Battez, pour qu'ils soient mousseux,
          Quelques oeufs;
Incorporez à leur mousse
Un jus de cédrat choisi;
          Versez-y
Un bon lait d'amande douce;

Mettez de la pâte à flan
          Dans le flanc
De moules à tartelette;
D'un doigt preste, abricotez
          Les côtés;
Versez goutte à gouttelette

Votre mousse en ces puits, puis
          Que ces puits
Passent au four, et, blondines,
Sortant en gais troupelets,
          Ce sont les
Tartelettes amandines !
 

Edmond Rostand, 1868-1918
. Cyrano de Bergerac II-4 (1897).


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3 novembre 2009 2 03 /11 /novembre /2009 18:47

La France en lutte

 

Mardi 20 octobre
- Le groupe allemand ThyssenKrupp a annoncé son intention de fermer d'ici mi 2010 son usine française de vilebrequins située à l'Horne (Loire). Cette fermeture devrait se traduire par le licenciement des 373 derniers salariés du site, l'activité étant transférée dans les unités allemandes, brésiliennes et américaines du groupe.
- Le climat social s'est tendu au chantier naval de Saint-Nazaire au sujet du nouvel accord de chômage partiel. La CFDT a rejoint la CGT dans le rejet de cet accord destiné à accompagner la restructuration de l'activité paquebots du chantier, en perte d'activités. Les anciens Chantiers de l'Atlantique sont passés à l'automne dernier dans le giron du groupe sud coréen STX Shipbuilding.  

Jeudi 22  octobre
- Le groupe Legris SA (fabrication de raccords souples pour l'industrie), propriété du nord- américain Parker Hannifin, vient d'annoncer un plan de départs volontaires portant sur 45 postes. Legris, dont les usines sont en Bretagne, a supprimé plus de 100 emplois depuis sa reprise, il y a un an,  par un groupe étranger. 

Vendredi 23  octobre
- Un salarié de PSA s'est donné la mort sur son lieu de travail, le site Peugeot Sport de Vélizy-Meudon (Yvelines).

Mardi 27 octobre
- Le groupe d'électronique de défense Thalès a annoncé le suicide d'une de ces salariée du site de Châteaubourg (Ille-et-Vilaine). Selon les syndicats, ce suicide serait lié aux mauvaises conditions de travail qui règnent dans cette unité de production. Le personnel s'est mis en grève illimité.

Jeudi 29 octobre
- Le groupe d'achat par correspondance Les Trois Suisses a annoncé un nouveau plan de départs volontaires concernant 110 à 115 salariés. Le groupe avait déjà décidé de supprimer 674 postes, soit 20% de ses effectifs, en février dernier.

Samedi 31 octobre
- Les employés de Chaffoteaux et Maury ont extrait de leur usine de Ploufragan (Côtes d'Armor) un millier de chauffe-eau pour négocier de meilleures conditions de départ dans le cadre du plan social qui touche 207 salariés du site.
- La justice suspend le plan social chez Sofinco. 200 salariés de l'établissement de crédit au particulier sont concernés par ce plan de départs volontaires. 

Lundi 2 novembre
- Le groupe de conseil en technologies Altran a confirmé avoir lancé un nouveau plan de départs volontaires, après l'annulation du précédent plan. 500 postes devraient être supprimés.

Mercredi 4 novembre
- Essex France (production de fils émaillés en cuivre), filiale du groupe américain Essex, envisage de fermer son usine de Mâcon qui emploie 86 salariés. 

Henri Valois.

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2 novembre 2009 1 02 /11 /novembre /2009 19:30
Défense européenne             
La grande illusion       


de Jean-Dominique Merchet
Mis en ligne : [02-11-2009]

Domaine : Idées

 

Jean-Dominique Merchet, 50 ans, est journaliste à " Libération ", en charge des questions militaires. Il anime le blog Secret défense. Il est l'auteur de Caroline Aigle, vol brisé (Jacob-Duvernet, 2007) et de Mourir pour l'Afghanistan (Jacob-Duvernet, 2008).


Jean-Dominique Merchet, Défense européenne, la grande illusion, Paris, Larousse, Juin 2009, 126 pages.


Présentation de l'éditeur.
Malgré tous ses efforts, l'Union européenne ne parvient pas à mettre sur pied une défense commune. Ainsi en décembre 1999, les Quinze décident de fonder une force militaire d'action rapide de 60 000 hommes à l'horizon 2003. Elle ne verra jamais le jour... Et c'est tant mieux ! Car la défense européenne est une illusion dangereuse, source de gabegie, d'impuissance et de renoncement. Loin d'être le mal dont souffrirait l'Europe, la pluralité et l'indépendance des nations ne seraient-elles pas le gage d'une défense efficace ?

Recension. - Politique Magazine, septembre 2009.
L'auteur est journaliste à Libération, en charge des questions militaires. Il anime le blog Secret défense. Cette étude sobre, bien construite, bien écrite, est admirable de clarté. C'est enlevé. Les faits sont là. Implacables. Même pas besoin de démonstration. Ce qu'on appelle la défense  européenne n'a jamais engendré que des montagnes de papiers, de discussions, de décisions, qui n'ont jamais été suivis d'aucun effet. Sinon des effets néfastes, sinon des coûts faramineux ! Ainsi de la force militaire d'action rapide de 60 000 hommes qui devait être opérationnelle en 2003. Et heureusement que la France n'a pas renoncé à ses Rafale ni à l'essentiel de sa dissuation nucléaire, ni à ses industries correspondantes. Les discours des politiques tombent dans le vide et ne correspondent à aucune réalité. Ce bref essai fait du bien à lire : il est drôle à force d'évoquer des choses affligeantes. Quel paquet de sottises est accumulé pour permettre à des esprits faux de se rassurer sur leur totale irresponsabilité ! Et on appelle çà de la politique.

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27 octobre 2009 2 27 /10 /octobre /2009 11:00
En vacances

La Revue critique des idées et des livres prend quelques jours de congé. Vous retrouverez toutes vos rubriques à partir du 2 novembre prochain. A très bientôt.

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26 octobre 2009 1 26 /10 /octobre /2009 11:42
Un quatrième militant
monarchiste condamné à mort


La Conférence monarchiste internationale communique :


Davood Fardbacheh Mir-Ardabili, né en 1973, est accusé d’être membre de l'Association de la Monarchie d’Iran. Il a été arrêté le 4 mai, c’est à dire avant les manifestations post-électorales du mois de juin, ce qui ne l’a pas empêché d’être jugé par la cour Révolutionnaire de Téhéran chargée de réprimer ces évènements. Davood Fardbacheh Mir-Ardabili n’a pas été autorisé à bénéficier d’un avocat, ni à assurer lui même sa défense.

La Conférence Monarchiste Internationale (CMI) proteste une nouvelle fois contre ces procès arbitaires. Le régime iranien vient de franchir une nouvelle étape dans l’abjection. Il ne s’agit plus maintenant de procès iniques mais bien d’un véritable assassinat judiciaire.

Davood Fardbacheh Mir-Ardabili vient ajouter son nom à ceux des trois autres militants monarchistes déjà condamné à la pendaison, le journaliste Mohammad-Reza Ali-Zamani (37 ans), Hamed Rouhinejad (24 ans) et le jeune Arash Rahmanpour (20 ans).

Ensemble, exigeons la libération des prisonniers politiques iraniens !

Signez la pétition : http://www.freezamani.org

Participez à la manifestation du 3 novembre 2009 à 19h, place d’Iéna à Paris, à côté de l’Ambassade d’Iran (Métro Iéna).

Porte- parole du collectif : Sylvain ROUSSILLON, secrétaire général de la CMI
Contact presse: Judith Taubel
Adresse email: freezamani@monarchiste.com
Site de la CMI
:
http://internationale.monarchiste.com



SIGNEZ LA PÉTITION POUR SAUVER ZAMANI ET SES CAMARADES !

Libérez Zamani !

 

TOUS A LA MANIFESTATION,  MARDI 3 NOVEMBRE,  19H,

DEVANT L'AMBASSADE D'IRAN, PLACE D'IENA A PARIS !

LIBERONS NOS CAMARADES IRANIENS !

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24 octobre 2009 6 24 /10 /octobre /2009 18:42
L'affaire Proglio              
     




 

On savait qu'il n'y avait plus de presse libre en France. On vient de découvrir qu'il n'y a même plus de presse intelligente. L'affaire de l'EPAD, vite devenue pour la circonstance l'affaire "Jean Sarkozy", est le symbole le plus éclatant de cet effondrement intellectuel. Quel est le résultat de toute cette belle agitation ? - Un spectaculaire recul du pouvoir, nous dit-on - Par rapport à quoi ? Le climat affairiste qui entoure cette affaire est-il dissipé ? Ce quartier de ville, où habitent et travaillent des centaines de milliers de nos concitoyens, va t-il  enfin sortir des griffes des promoteurs ? La fuite en avant financière organisée par le pouvoir pour sauver la mise à une poignée d'aigrefins a-t-elle fait long feu ? - Mais pas du tout voyons, vous n'y êtes pas ! "Il" a renoncé, vous comprenez, c'est une victoire immense! - Mais qui, "il" ?  - Mais, le fils Sarkozy, voyons, il ne sera pas président de l'EPAD! Nous avons évité un scandale énorme, une véritable honte pour la France dans le monde, une dérive monarchique du pouvoir, comprenez vous ? Mais grâce à nous, tout est fini et bien fini. Passons maintenant au sujet suivant...

Voilà comment l'on traite désormais de la politique dans ce pays. Tout y est vu par le bout de la lorgnette le plus minable et le plus facile. La morale, ou plutôt le moralisme, tient désormais lieu d'esprit public à ce qu'on appelle la presse d'information. Une bande de docteurs de la loi y règne en maître et traque, sous la houlette éclairée du Monde, notre grand journal suisse de langue française, tout se qui pourrait tenir lieu, de près ou de loin, de tentation "monarchique", de séduction "royale" ou d'appétit "dynastique". Que ces gens aient pour songe creux de transformer la France et ses 2000 ans d'histoire en annexe d'un patronage protestant, en séminaire permanent pour pasteurs en goguette ou en débit de tabac pour pensionnés du canton de Vaud, c'est leur affaire! Mais, de grâce, qu'ils laissent la place à d'autres pour commenter sérieusement nos sujets politiques qui ne tournent déjà pas bien rond.

Le triste résultat de la pantalonnade médiatique de jeudi dernier, c'est qu'une partie du pays, sous l'influence de cette calamité médiatique, est désormais convaincu que l'affaire est terminée, que le dossier est clos, que plus rien n'est en jeu. Alors que c'est  maintenant que la vraie partie va s'engager et qu'il faut au contraire redoubler de vigilance. Si l'on n'avait pas peur de donner une trop haute opinion du pouvoir en place - qui compte, certes, quelques oiseaux de proie, comme M. Guéant, mais aussi pas mal de perruches - on pourrait  risquer l'idée que tout cela a été monté de haute main, pour faire une excellente diversion. Disons plutôt que l'équipe en place a su rebondir et faire d'un mal un bien. En tous cas, le résultat est là: dormez, braves gens, il ne se passe plus rien sur la Défense!

L'autre beau résultat de cette agitation inepte, c'est l'absence de commentaires sur l'affaire Proglio. On sait que M. Henri Proglio, qui tient, pour quelques semaines encore, entre ses mains les destinées de l'empire Véolia, est un proche du chef de l'Etat, un proche des proches, un allié comme on disait autrefois. Ce proche, cet allié est appelé à prendre, fin novembre, la direction d'un autre empire, celui là public, EDF. Non pas que les compétences manquaient au sein de notre grand électricien national, on y compte même des  dirigeants de premier plan qui auraient parfaitement fait l'affaire au mieux de nos intérêts, mais c'était sans compter sur la nouvelle  "morale industrielle" qui sévit depuis deux ans à Matignon et à Bercy, sous l'amicale impulsion de l'Elysée: il faut hybrider les nominations. Comprenez : il faut que les stars du privé prennent un peu de bon temps à la tête de nos affaires publiques. On a vu cette excellente stratégie à l'oeuvre l'an dernier avec le rapprochement GDF-Suez. Les dirigeants de Suez ont croqué à belles dents l'entreprise publique, qui s'est retrouvée privatisée sans que quiconque y ai vu quoi que ce soit, à commencer par les syndicats et l'opposition. Et c'est naturellement le même coup mais en beaucoup plus gros qui se prépare pour EDF. Non seulement M. Proglio est un "hybride" parfait, non seulement il est une sorte de  "cousin" du chef de l'Etat, ce qui ne gâche rien, mais en plus il va pouvoir rester président de Véolia, pour activer les "synergies" entre les deux entreprises. On parle déjà d'échanges de participations.

Quelques commentateurs se sont malgré tout inquiétés des risques déontologiques qu'une telle situation pouvait créer, notamment dans le secteur de l'énergie où les deux groupes sont concurrents sur plusieurs marchés étrangers. Le gouvernement a vite balayé le sujet de la main, en précisant que M. Proglio ne conserverait aucune fonction exécutive chez Véolia - ce qui n'empêche rien - et qu'un arbitre serait désigné pour éviter tout conflit d'intérêt entre les deux structures. Le nom de M. Schweitzer ayant été évoqué pour cet arbitrage, cela a eu pour effet de dissiper toutes les interrogations de notre presse "genevoise"! Quant aux impératifs d'intérêt national et de service public, qui sont essentiels dans un secteur aussi stratégique que l'énergie, il n'en fut même pas question. On peut espérer que les syndicats et que les partis d'opposition soulèveront ces sujets hautement sensibles, au moment voulu.

Reste que la nomination de M. Proglio ressemble comme deux gouttes d'eau à une privatisation camouflée. Aucun organe de presse, en dehors de la voix bien faible de l'Humanité, n'a mis cette question à sa une, ce qui est symptomatique du degré d'autocensure qui existe actuellement dans la sphère médiatique française. Aucune réaction non plus de la part des syndicats - qui consultent leurs bases -, ni de l'opposition - qui découvre le sujet. Il est vrai que les informations ont filtré au "goutte" à "goutte" mercredi et jeudi, alors que l'affaire "Jean Sarkozy" occupait, bien inutilement, tous les écrans. Espérons que, lundi, d'autres diversions ne viendront pas brouiller les pistes de ce qu'il faudra bien, tôt ou tard, appeler l'affaire Proglio.


  Hubert de Marans.


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N°1 - 2009/01
 
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