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12 juin 2011 7 12 /06 /juin /2011 23:57
Le capitalisme à l'agonie          
 
de  Paul Jorion
Mis en ligne : [13-06-2011]
Domaine :   Idées   

JORION--Paul-.gif

 
Paul Jorion, né le 22 juillet 1946, est anthropologue, sociologue et économiste. Il est l'un des rares chercheurs à avoir anticipé la crise des subprimes américains de 2006 et le risque de récession mondiale qui en a résulté. Il a publié récemment : Vers la crise du capitalisme américain ? (La Découverte, 2007), L'implosion : la finance contre l'économie : ce qu’annonce et révèle la "crise des subprimes" (Fayard, 2008), La crise : des subprimes au séisme financier planétaire (Fayard, 2008) , L'argent, mode d’emploi (Fayard, 2009), Comment la vérité et la réalité furent inventées ( Gallimard, 2009), Le prix (Broissieux, 2010).
 

Paul Jorion, Le capitalisme à l'agonie. Paris, Fayard, mars 2011, 348 pages.


 
Présentation de l'éditeur.
À la chute du mur de Berlin en 1989, le capitalisme triomphait. Vingt ans plus tard, il est à l’agonie. Qu’a-t-il bien pu se passer entre-temps ? Une explication possible est que le capitalisme a été atteint du même mal qui venait de terrasser son rival, et la complexité devrait alors être incriminée : l’organisation des sociétés humaines atteindrait un seuil de complexité au-delà duquel l’instabilité prendrait le dessus et où, sa fragilité étant devenue excessive, le système courrait à sa perte. Une autre explication serait que le capitalisme avait besoin de l’existence d’un ennemi pour se soutenir. En l’absence de cette alternative, ses bénéficiaires n’auraient pas hésité à pousser leur avantage, déséquilibrant le système entier. Autre explication possible encore : du fait du versement d’intérêts par ceux qui sont obligés d’emprunter, le capitalisme engendrerait inéluctablement une concentration de la richesse telle que le système ne pourrait manquer de se gripper un jour ou l’autre. Entre ces hypothèses, il n’est pas nécessaire de choisir : les trois sont vraies et ont conjugué leurs effets dans la première décennie du xxie siècle. Cette rencontre de facteurs mortifères explique pourquoi nous ne traversons pas l’une des crises habituelles du capitalisme, mais sa crise majeure, celle de son essoufflement final, et pour tout dire celle de sa chute. Anthropologue, sociologue et spécialiste de la formation des prix, Paul Jorion jette depuis plusieurs années un autre regard sur l’économie ; il annonçait ainsi dès 2005 ce qui allait devenir la crise des subprimes. Il est également l’auteur, chez Fayard, de L’Implosion, La Crise et L’Argent.
 
Critique d'Alain Faujas. Le Monde du 7 avril 2011.
Le spectre de Karl Marx.  Voici un livre au titre sensationnel - Le Capitalisme à l'agonie - qui débute franchement "marxiste" et par la critique implacable de ce qui, selon Paul Jorion, sociologue, spécialiste de la formation des prix et chroniqueur au "Monde Economie", n'est pas "un système économique, mais une tare de notre système économique". Il déploie ensuite une analyse très fine des mécanismes historiques et psychologiques où s'affrontent notamment la liberté et l'égalité, l'éthique et la propriété. Mais l'auteur se sépare de Marx et de son spectre en ce qu'il ne distingue pas deux classes d'acteurs (capitaliste et prolétaire), mais quatre : le capitaliste, l'entrepreneur, le salarié et le marchand. Dans la lutte implacable pour la captation du surplus dégagé par leur activité conjointe, c'est le salarié qui perd à tout coup, car l'intérêt versé au capital et les positions de force des trois autres acteurs concentrent peu à peu la richesse et le patrimoine dans les mains d'un tout petit nombre.  Ce n'est donc pas la baisse tendancielle des profits qui tuera le capitalisme, comme le croyait Marx, mais l'accumulation outrancière du capital, car l'intérêt versé aux capitalistes les enrichit toujours plus et les investisseurs substituant les machines au travail, le pouvoir d'achat et la consommation se tarissent. Il ne reste plus que le crédit pour maintenir la demande, jusqu'à ce que le paiement des intérêts de celui-ci achève d'appauvrir la cohorte des salariés. Le jeu s'arrêtera quand il n'y aura plus assez de joueurs. Faisant un long détour par la crise actuelle qu'il voit comme les prémices de l'effondrement, l'auteur met surtout en pièces la spéculation dont il décrit par le menu les turpitudes et les stupidités, les produits financiers "pourris", les modèles mathématiques et les ordinateurs chargés de grappiller des milliards de centimes en moins d'une seconde en détraquant sciemment l'offre et la demande. Non, dit Paul Jorion, la spéculation ne met pas de l'huile dans les rouages du marché, comme ses tenants le prétendent, mais elle y met le feu. Parce que les Bourses sont devenues des maisons de jeu légales et dangereuses, peut-on les contraindre pour autant ? Sacrifier la liberté à la vertu ? La propriété à l'éthique ? Le brillant renfort de Marat, Robespierre, Hegel, Freud ou Lacordaire, comme celui de l'anthropologie et de la psychologie des profondeurs ne lui permettent pas de trancher. Proche de John Maynard Keynes, Paul Jorion s'en distingue en ce qu'il ne croit plus à la possibilité de parvenir au plein-emploi qui remettrait le travailleur au centre et l'économie sur ses pieds. Il appelle donc à "un changement de civilisation". Pour réussir cette mutation, sa préférence va à l'instauration d'un système "où les revenus proviendraient d'une autre source que le travail", ce qui supposerait la création d'un "revenu minimum universel". Et ce qui supposerait encore plus une intervention de la puissance publique pour mieux répartir les richesses - sans pour autant tomber dans la dictature - à savoir la fiscalité. Il énonce quatre principes : "ne pas imposer le travail qui constitue sans conteste l'activité humaine la plus utile et la plus digne d'être encouragée" ; "imposer substantiellement les revenus du capital" (dont les stock- options) ; "imposer de manière dissuasive les gains du jeu" (y compris les opérations financières) ; "éliminer les rentes de situation". Autrement dit, il n'est point question de révolution, mais de "remettre les compteurs à zéro", de gré ou de force. Le capitalisme n'est pas vraiment à l'agonie, mais il a une fièvre de cheval et Paul Jorion fait partie des médecins qui se pressent à son chevet.

 

Autre critique :  , "Faut-il enterrer le capitalisme",

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