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2 mai 2011 1 02 /05 /mai /2011 23:43
Vers l'Etat palestinien
 
Le vent de l'histoire souffle à nouveau sur la Palestine. Mahmoud Abbas avait déclaré au début du mois d'avril que la résistance prendrait prochainement des initiatives historiques. C'est chose faite. Le Hamas - qui contrôle Gaza - et le Fatah - qui contrôle la Cisjordanie - ont annoncé au Caire dans la soirée du 27 avril qu'ils venaient de conclure un accord de réconciliation. Ce compromis sera signé demain, en présence de l'ensemble des dirigeants palestiniens. Il prévoit la formation d'un gouvernement de transition, composé de "techniciens", et la tenue d'élections présidentielle et législatives à échéance d'un an. Même si plusieurs points restent encore à préciser, il s'agit là d'un acte politique de première importance. 
Le rapprochement des frères ennemis palestiniens a pris tout le monde de court, à commencer par Washington et Tel Aviv. L'administration américaine n'en laisse rien paraître mais elle est furieuse d'avoir été mise au pied du mur par le Président Abbas. La réconciliation interpalestinienne n'a de sens que si elle permet de relancer les discussions avec Israël, avait dit en substance Mme Clinton lors de son dernier déplacement au Proche Orient. Ce qui suppose une reconnaissance d'Israël par les deux parties palestiniennes. Or tel n'est pas le cas : le Hamas s'est empressé de dire que l'accord de mercredi n'envisage "ni négociations, ni reconnaissance" de l'Etat hébreu par le futur gouvernement de transition. Et que celui ci n'a aucune intention de se placer dans la roue des Etats Unis. Quant au Premier ministre israélien, M. Nétanyahou, il a réaffirmé mercredi soir que M. Abbas "devait choisir entre la paix avec Israël et la paix avec le Hamas". Visiblement, le choix vient d'être fait. Dans son dos.
Il est clair que les révoltes qui agitent le monde arabe ne sont pas étrangères à ces initiatives. A Gaza comme à Ramallah, l'opinion publique a suivi avec passion les évènements d'Egypte et elle s'informe heure par heure de ce qui se passe en Syrie. Comme au Caire et à Damas, c'est la jeunesse qui est à la pointe du mouvement. Les réseaux sociaux ont commencé à faire circuler début mars des manifestes appelant ouvertement à la réunification du mouvement national palestinien. Le 15 mars, des dizaine de milliers de manifestants ont défilé sur les places de Gaza et de Cisjordanie aux cris de "unité, liberté". La situation était potentiellement dangereuse pour les deux exécutifs : ne rien faire les exposait à être, l'un comme l'autre, balayés par la rue, se réconcilier comportait un risque de crise avec Israël et l'Occident. Ils ont préféré le second scénario, politiquement moins risqué à court terme.
M. Abbas a une raison supplémentaire d'accepter ce compromis. Il milite depuis six mois pour la reconnaissance par l'ONU d'un Etat palestinien, seul moyen à ses yeux de sortir de l'impasse des discussions avec Israël. Si cette démarche recueille le soutien de nombreux pays du tiers monde, elle se heurte encore à des réticences du côté de l'Occident. Les Etats Unis continuent de privilégier la voie d'un accord entre Israéliens et Palestiniens modérés. Les Européens sont plus ouverts. Dans une déclaration commune diffusé le 18 février dernier, la Grande Bretagne, la France et l'Allemagne ont condamné la politique de colonisation israélienne et laissé entendre que la reconnaissance d'un Etat palestinien n'était plus un sujet tabou. Lors de sa visite à Paris le 20 avril dernier, M. Abbas a obtenu le soutien du gouvernement français et M. Juppé lui a confirmé que les Européens travaillaient à une reconnaissance par l'ONU en septembre ou octobre prochain. Avec un soutien de la Russie et de la Chine et peut être une abstention américaine. Mais M. Abbas sait que sa solution n'est viable que si la Palestine est unie politiquement et territorialement. L'accord du Caire lève ces conditions essentielles.
 La perspective d'un Etat palestinien est donc ouverte. Les arabes d'Israël, de Cisjordanie et de Gaza le souhaitent, leurs dirigeants y travaillent et l'Europe a compris que c'était sans doute l'ultime levier pour faire évoluer la situation au Proche Orient. Le Gouvernement de Tel Aviv voit cette perspective avec horreur. Il porte pourtant l'entière responsabilité de la situation présente, car c'est son intransigeance, son refus de négocier sérieusement et sa politique criminelle de colonisation qui jettent aujourd'hui les Palestiniens dans cette voie. Il est vraisemblable qu'il cherchera à s'y opposer, au risque de se mettre à dos l'ensemble de la communauté internationale. Il faudra qu'il en mesure complètement les conséquences  pour Israël. Il est loin le temps de la guerre froide, de la surpuissance américaine, de l'impuissance arabe et d'une certaine indulgence vis-à-vis de l'Etat hébreu. Le monde est lassé de l'éternel conflit du Proche Orient et il voit avec sympathie les peuples arabes secouer leurs jougs. Gare à ceux qui se mettront en travers de l'histoire.
Claude Ares.

  

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