Par la Revue critique des idées et des livres
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le rêve de l'aventurier | ||
Que ce soit l’hiver ou l’été Qu’il soleille, qu’il pleuve ou qu’il neige, Dans le village ou la cité Je n’ai jamais pu rattraper Le cheval de bois qui trottait Devant le mien, sur le manège, Et je l’ai toujours regretté… Qu’elle soit brune, qu’elle soit blonde, Non je n’ai jamais rencontré Dans mon voyage autour du monde La fille qui m’aurait ancré Dans une baie vaste et profonde Sous un toit de brassé carré Auprès d’un jardin de curé. Qu’importe au lieu de mon tombeau Le cyprès l’if ou la colombe L’outremer ou le bleu barbeau D’un ciel éclaté comme bombe, Ou gésir entre algue et turbot Au fond de la mer errabonde, A moins qu’une sirène verte M’accueille en ses bras entr’ouverts Et me prodigue pour ma perte L’ombre d’étranges univers D’étoiles de mer fleurs offertes Dans ses palais aux volets verts. | ||
maurice fombeure (1906-1981). Poèmes inédits (Seghers, 1957). | ||
trois chevaliers | ||
Trois chevaliers chaussés à la poulaine Vois. Ils s'en vont vers l'épaisseur des bois Jean Bedelaine Bec de Molène Robe de Job de Gobelin Bernois Tels sont leurs noms. La fine fleur de France Des chevaliers qui s'en vont à cheval Le sein des vents se gonflait en silence La lune fuit à pas d'or vers l'aval Où s'en vont-ils ? Chasser la darigole Tout empennée d'oiseau comme un poisson Bête rusée qui n'est point malivole, Vient se poser parfois sur votre arçon Soleil français reluira sur la plaine Mais velouté crépuscule du soir Les accompagne et feutre de futaine Leurs pas trèfles semés au coeur des soirs La grand' forêt gigogne des légendes Souvre pour eux comme un coeur de lilas Parfume ses bruyères et ses branches Fait chuchoter ses chouettes et ses glas Tels ils s'en vont vers la lune unicorne Vers un sommeil qui n'aura pas de fin Chasser la darigole ou la licorne A pas feutrés sur ce monde défunt.... | ||
maurice fombeure (1906-1981). Aux créneaux de la pluie (Gallimard, 1946). | ||
les écoliers | ||
Que ce soit l’hiver ou l’été Sur la route couleur de sable, Le 'moyen', le 'bon', le 'passable' Vont à galoches que veux-tu Vers leur école intarissable. Ils ont dans leurs plumiers des gommes Et des hannetons du matin, Dans leurs poches du pain, des pommes, Des billes, ô précieux butin Gagné sur d'autres petits hommes. Ils ont la ruse et la paresse Mais l'innocence et la fraîcheur Près d'eux les filles ont des tresses Et des yeux bleus couleur de fleur, Et des vraies fleurs pour leur maîtresse. Puis les voilà tous à s'asseoir. Dans l'école crépie de lune On les enferme jusqu'au soir, Jusqu'à ce qu'il leur pousse plume Pour s'envoler. Après, bonsoir ! | ||
maurice fombeure (1906-1981). A dos d'oiseau (Gallimard, 1942). | ||
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