Service littéraire [1], c'est le titre d'une curieuse petite feuille qui circule depuis quelques temps dans Paris, pour le plus grand plaisir des amoureux de la littérature. Feuille d'ailleurs n'est pas vraiment le terme approprié ; il s'agit en réalité d'un vrai petit journal, fait par des écrivains qui savent écrire, par des journalistes qui ont des choses à dire et qui savent les dire. Voilà pour nous changer des magazines stéréotypés, des suppléments poussiéreux ou des blogs de copinages qui encombrent trop souvent l'horizon de la critique littéraire.
Après seize mois d'existence, notre petite feuille a fait son trou. Ses rubriques se sont enrichies, épaissies. Sous la houlette débonnaire de François Cérésa (qui nous a régalé l'an dernier d'un roman plein de charme, les Moustaches de Staline [2]), une équipe de choc s'est constituée et nos lecteurs auront plaisir à y retrouver Eric Deschodt, Guillaume de Sardes, Gilles Martin-Chauffier, Christian Millau, Bruno de Cessole, François Bott, Éric Neuhoff, Daniel Rondeau, Bernard Chapuis, Claude Cabanes, mais aussi Maurice Druon, Michel Déon, Hélène Carrère d'Encausse, Frédéric Vitoux, Max Gallo,...Jugez du peu !
L'œil de nos serviteurs de la littérature est plutôt vif et leur goût assez sûr. S'ils savent manier la louange et servir le compliment, leurs éreintements et leurs coups de pieds au derrière sont en général bien ajustés. La littérature à l'estomac en prend pour son grade, et les volées de bois vert qui tombent - au figuré bien sûr - sur le dos des Philippe Djian, des Paul Auster, des Marc Edouard Nabe, des Philippe Besson, des Christine Angot et autres Amélie Nothomb, sont un vrai régal. Même le triste Houellebecq, qu'une certaine complaisance « hussarde » a parfois tendance à épargner, est ici régulièrement étrillé, et c'est tant mieux. Quant aux auteurs anglo-saxons - ceux qu'il nous faut subir chaque semaine dans les suppléments « littéraires » du Monde ou du Figaro, ou dans les pages dites « culture » de Libération - ils y occupent la place qu'ils méritent, c'est-à-dire assez peu de choses.
Au sommaire de la dernière livraison, datée de février, on trouvera pêle-mêle une chronique inspirée de Jean Vautrin contre le "nanisme " littéraire, un beau portrait de Jacques Chessex par Bernard Morlino et un chapelet de notes de lectures signées de Christian Millau, François Cérésa, Eric Deschodt, Bruno de Cessole, François Bott et Frédéric Vitoux, sans oublier les réjouissantes rubriques "Ecrits et Chuchotements" et "On trouve ça bien - On trouve ça mauvais" où les pâles écrevisses de la littérature pipôle sont traitées comme il convient !
Gageons que nous reviendrons régulièrement sur la brillante production de cet aérolithe littéraire.
Eugène Charles.
[1]. Service littéraire, mensuel - 24 rue de Martignac 75007 Paris - www.servicelittéraire.fr
[2]. François Cérésa, Les moustaches de Staline. (Fayard, 2008, 257 p.).