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Le pape et le roi Anagni, 7 septembre 1303 de Guillaume de Thieulloy Mis en ligne : [4-10-2010] Domaine : Histoire |  |
Guillaume de Thieulloy, né en 1974, est l'auteur de deux essais sur Jacques Maritain : Le Chevalier de l'absolu (Gallimard, 2005), et Antihumanisme intégral (Pierre Téqui, 2006).
Guillaume de Thieulloy, Le pape et le roi. Anagni, 7 septembre 1303. Paris, Gallimard, mars 2010, 268 pages.
Présentation de l'éditeur.
Ce samedi, à l'aube, la paisible ville d'Anagni, où le pape Boniface VIII séjourne dans son palais pontifical, est investie par des centaines d'hommes armés, conduits par un émissaire de Philippe le Bel. Ils ont ordre de se saisir de la personne du souverain pontife et de lui signifier sa mise en accusation pour hérésie. Violences, pillages, des morts, des blessés, et voici le vicaire du Christ, assis face à ses agresseurs, coiffé de la tiare et serrant dans ses mains un crucifix taillé dans le bois du Golgotha. Bientôt le peuple s'émeut, se révolte et fait libérer le pape captif. Que signifie la présence du confident d'un roi de France à la tête d'une meute de soudards ? Que cherche Philippe le Bel ? Pourquoi ce procès en hérésie intenté au chef de la chrétienté ? Comment le pape et le roi en sont-ils venus à cette extrémité ? Telles sont les questions que tente d'élucider cet ouvrage. Il reconstitue les termes et les enjeux d'une controverse inséparablement théologique et politique, brosse le portrait des deux figures exceptionnelles qui dominent ce théâtre éclatant, interroge les théories et les arguments mobilisés par les deux camps, avant de décrire le cheminement qui a conduit fatalement à cette guerre des principes. Le pape entendait exercer une autorité directe sur les princes temporels. Le roi affirmait détenir son pouvoir de Dieu seul. C'est cette autonomie sacrale qui donnera plus tard sa physionomie à la nation France. L'épreuve d'Anagni porte déjà en germe ce qu'on appellera plus tard le gallicanisme. C'est alors également que sont réunis pour la première fois les États généraux du royaume. La France entre dans une nouvelle ère.
Recension de Olivier Marin. - Etudes, juillet 2010.
Une fois n’est pas coutume, la prestigieuse collection « Les journées qui ont fait la France » n’a pas fait appel à un historien patenté, mais au jeune essayiste G. de Thieulloy pour présenter un nouvel épisode emblématique du « roman national ». Il faut dire que les précédents livres que l’auteur a consacrés à Jacques Maritain et à Charles Journet l’avaient préparé à sonder les profondeurs théologico-politiques de ce qui est resté dans toutes les mémoires comme le point d’orgue de la lutte sans merci entre le vieux pape Boniface VIII et l’ambitieux roi de France Philippe le Bel : l’attentat d’Anagni. L’événement comme tel est (peut-être trop) rapidement traité. L’essentiel de l’ouvrage consiste, en remontant aux origines du conflit et en suivant ses multiples rebondissements, à élucider les motivations des protagonistes et de leurs comparses ; l’écheveau complexe des jeux d’intérêts, des susceptibilités nationales et des prétentions idéologiques y est démêlé avec pédagogie. Ici ou là, de menues erreurs factuelles ou des raccourcis discutables pourront certes indisposer le spécialiste, qui regrettera également la faible place accordée aux chroniques du temps. Il n’empêche que l’ensemble, nourri aux meilleurs travaux récents (A. Paravicini Bagliani, J. Coste, J. Krynen), est de bonne facture et constitue un point de départ bienvenu pour quiconque s’intéresse à la genèse des Eglises nationales, et singulièrement de l’Eglise « gallicane », sur les décombres de la théocratie médiévale.
la revue critique des idées et des livres
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Notes Histoire