souvenir | ||
Le jardin se déroule en pelouses précises, Frais tapis étoiles où voltige un oiseau ; Dans l'azur luit le rire argenté du jet d'eau Et de leur propre encens les fleurs paraissent grises. Au firmament léger dérivent des banquises ; L'allée amène au seuil où des roses ponceau Dressent contre le mur la gloire d'un arceau. Dans la grande maison vivent des ombres grises. C'était par un printemps pareil à celui-ci Et dans le clair séjour de l'âge sans souci Que la mort Vous saisit, Vous qui fûtes l'élue. Si j'ai connu depuis l'amour et la beauté, Cette vaine demeure à la nuit dévolue Jamais plus ne s'ouvrit aux splendeurs de l'été. | ||
jean pourtal de ladevèze (1898-1976). Revue « La Muse française ». (1937). |
septembre | ||
Tu t'es réveillé ce matin Parmi les chants, parmi la joie Des oiseaux, des fleurs et la soie Des beaux rayons au ciel sans tain. La douceur du jour, ses dorures T'ont pu laisser croire un instant Qu'au vif de l'été le printemps Renaissait en pales verdures. Le soleil pique de rousseurs La route et les façades blondes ; A la couronne des tours rondes Les pigeons roucoulent, danseurs ; Et le jeune amour que tu portes Vers un chimérique destin Voit se poser dans le jardin Le premier vol de feuilles mortes. | ||
jean pourtal de ladevèze (1898-1976). Sur les Balcons du ciel. (1936). |
stances | ||
La lumière joue indécise Sur les vagues étangs du soir Et rose, mauve et bleue, irise L’onde secrète du miroir. Nul visage n’a laissé trace Du passé sitôt aboli Sur l’insensible et vaine glace Entre les berges d’or pâli. Mais s’y reflète un paysage Lointain et clair, pressé de nuit : Sous le feu rouge d’un nuage La rivière doucement luit. Narcisse est mort sur ce rivage : Une lame d’argent poli N’aurait su garder davantage Sa belle forme de l’oubli. | ||
jean pourtal de ladevèze (1898-1976). Revue « Le Divan ». (1941). |