été | ||
Un vol d'abeilles tourne au-dessus des rosiers Où la lumière matinale glisse et joue. Une enfant passe avec du soleil sur la joue, Dans la ronde des buis autour des balisiers. Sur la crête du mur parmi les groseilliers Un paon dresse son col turquoise et fait la roue ; Le peuple d'animaux de la ferme s'ébroue Et l'on entend les coqs chanter à pleins gosiers. La chaleur se répand comme une onde muette A travers les halliers et les jardins en fête ; L'arbre vibre de joie et danse en ses rameaux. O saison du soleil dont les âmes sont pleines, Tu traverses les champs, les forêts, et les eaux, Comme un grand oiseau d'or qui vole sur les plaines. | ||
frédéric saisset (1873-1907). Revue Poésie. (1928). |
airs du pays | ||
Lo Pardal s'est couché sur l'oranger, mignonne, Et l'air du soir fraîchit sur les montagnes d'or ; Le Canigou neigeux dans du soleil s'endort, N'est-ce pas ton amour qui se penche et se donne ? La Bèpe à la rivière agite l'eau sonore, Frappant de son battoir expert son tablier... Si longtemps qu'elle va sûrement oublier Qu'on l'attend, pauvre Bèpe, et qu'on la cherche encore. Mais voici Jean del Riu, le vigilant garçon Qui va, faisant danser, de village en village, Jeunes filles et jouvenceaux sur son passage, Ce brave Jean del Riu, avec son violon !... Et c'est, là-bas, un groupe où la flûte module, Au son de la guitare, un air lent et rythmé Où notre Roussillon natal s'est enfermé... Goigs dels ous, chant du nostalgique crépuscule. Mais L’Hortolana cueille au jardin des fruits verts. Ventura de la mort de son âme soupire... Pour le quadrille !... en place! ô couples en délire ! C'est tout le Roussillon qui passe dans ces airs ! | ||
frédéric saisset (1873-1907). Paysages de l'âme. (1912). |
les filles de la ferme | ||
Les Filles de la ferme, au sourire d'enfant, Qui cueillent tout le jour le raisin d'or des vignes, Ont des gestes naïfs et doux comme des cygnes Et des yeux où l'amour s'étale, triomphant. Elles rentrent le soir sous l'ombre des prairies Où leurs rires joyeux s'échappent en essaims. Un parfum jeune et chaud s'exhale de leurs seins. Leurs lèvres ont le goût des campagnes fleuries. Elles chantent. L’air clair qui caresse leur chair De sonores baisers les berce et les enivre ; Elles chantent la joie et la fierté de vivre, Et leurs rires ailés s'envolent dans l'air clair. Le Soir semble écouter, grave, au fond de la plaine, Le rythme paresseux de leurs folles chansons. Leur candeur fait rêver les oiseaux des buissons. Le ciel, plus doux, semble ridé de leur haleine. Elles chantent en chœur, et les sources des bois N'ont pas de sons plus purs que leur fraîche musique ; Et la Nuit à pas noirs, descend, mélancolique, Sur les rires derniers et les dernières voix. | ||
frédéric saisset (1873-1907). Les Soirs d'ombre et d'or. (1898). |