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chateaux dans la montagne
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Tandis qu'à l’horizon dansent les croupes vertes De la montagne offerte au soleil de juillet, Les portes des châteaux demeurent grand ouvertes Sur les gazons fleuris de pivoine et d'œillet. Mais quand nous franchirons les enceintes d'ombrages Captives des fossés où dort un pont-levis, Saurons-nous découvrir les voix et les visages Aux bonheurs d'autrefois par le destin ravis ? Dans les après-midi l'accueil des châtelaines Dont le rire enchantait le parc plein de soleil Ne réjouira plus nos cœurs près des fontaines, Sous les pins où le vent propage un lourd sommeil. Rondes, colin-maillard courant sur les prairies, Lents croquets poursuivis jusqu'à la fin du jour, Promenades sous bois, galantes rêveries : Un aimable enjouement préludait à l'amour. Rentrez vos blancs moutons! Il pleut sur la montagne. L'herbe des près frissonne et le ciel devient froid. La bourrasque du nord, que l'averse accompagne, Remplit tous les ravins de souffrance et d'effroi. Sous les murs des châteaux les roses sont fanées Avant l'automne — et dans nos souvenirs amers, Comme un brouillard sans fin défilent les années Qui vont nous engloutir au gouffre des hivers. Ce soir où le vent noir, frappant les roches nues, De l'océan des bois fait jaillir des sanglots, Dans vos manoirs de songe, ô belles inconnues, Reines d'anciens étés, m'obsèdent vos yeux clos. |
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louis pize (1892-1976). La Muse française (janvier 1939).
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jours de clarté
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Les beaux jardins sur la colline L’eau dans un golfe ensevelie… Tout Gardone chante en sourdine La fièvre et la mélancolie. De mainte fleur déjà fanée S’attristent les sommets arides. Oublions notre destinée Sous la treuille des Hespérides La figue ouvre sa chair dorée La pêche aux lèvres s’abandonne En mordant la grappe sucrée Buvons aux sources de l’automne. Les oliviers sont immobiles Sous leur fardeau léger de cendre. Vois les cyprès, en longues files, Vers l’onde et vers l’ombre descendre. |
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. Le Divan. (mars 1941).
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chanson de montagne
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Pas de maisons, pas de feuillages. Le soleil cache le ciel bleu. La route est longue où tu voyages. Dans le désert des prés en feu Approche ta jument légère Où vas-tu, cavalière ? Le vent qui tord les herbes grêles Monte la garde autour du col. Son souffle agite tes dentelles. il veut t'étendre sur le sol. Mais tu bondis, joyeuse et fière, Où vas-tu, cavalière ? La ferme est loin, le vent s'irrite, Casse les pierres en courant. Ta jument saute bien plus vite, Et, sur l'horizon transparent, Monte un nuage de poussière. Où vas-tu, cavalière ? |
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. Chansons de montagne. (1929).
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